Carte de visite
Gisèle Quenneville, Linda Godin and Daniel Lessard meet exceptional francophones from throughout Canada and beyond. Discover politicians, artists, entrepreneurs and scientists whose extraordinary stories are worth telling.


Video transcript
Josée Bourgoin and Michel Dubé: Saskatchewan Bison Ranchers
More than bison ranchers, Michel Dubé and Josée Bourgoin are advocates for local products from the Prince Albert, Saskatchewan, area.
Michel, a Fransaskois, and Josée, an Acadian, have chosen to call the Saskatchewan Plains their home.
They raise bison on their farm and work tirelessly to fulfill a dream: to spread the love for the region and its products well beyond provincial borders.
Réalisateur: Linda Godin
Production year: 2015
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Titre :
Carte de visite
On se trouve sur une ferme dans les Prairies, près d'un chemin de fer en hiver.
GISÈLE QUENNEVILLE fait une brève présentation du couple MICHEL DUBÉ et JOSÉE BOURGOIN, éleveurs de bisons à Prince-Albert, Saskatchewan. Pendant la présentation, on présente les bâtiments de ferme et ensuite on visite la boutique des produits de bison Méridian.
GISÈLE QUENNEVILLE (Narratrice)
Lui est Fransaskois, elle est Acadienne.
Ils ont fait leur vie sur les
plaines de la Saskatchewan.
Aujourd'hui, Michel Dubé et
Josée Bourgoin vivent à quelques
minutes de Prince Albert,
sur une ferme où ils
élèvent des bisons.
Leur rêve: faire connaître
leur région et ses produits
au monde entier.
Josée, Michel, bonjour.
GISÈLE QUENNEVILLE rencontre MICHEL DUBÉ et JOSÉE BOURGOIN dans leur boutique.
MICHEL DUBÉ
Bonjour.
MICHEL DUBÉ
Vous êtes des éleveurs
de bison. Pourquoi le bison, Michel?
MICHEL DUBÉ
Bien, c'était... D'abord,
on avait déjà des terres qui
étaient louées ou inoccupées
il y a une quinzaine d'années.
Puis un de mes copains qui
étaient en phase de retraite
lui aussi avait des terres
adjacentes aux nôtres.
Il voulait faire quelque chose,
il voulait faire un projet. Lui, il
voulait se lancer surtout dans
l'élan, le wapiti. Puis de fil
en aiguille, on a décidé qu'on
ferait le bison pour une couple
de raisons. Une principalement:
c'est un animal qui est déjà
très, très bien adapté ici, dans
la région, qui l'a toujours été
depuis des millions d'années.
Deuxièmement, c'était le...
On commençait à entendre parler
un peu plus de bison, puis de
l'importance, puis de la qualité
de la viande, puis que ça allait
répondre tranquillement
à l'avenir à des besoins
changeants des consommateurs.
Puis c'était un endroit qui
était... On avait à peu près
toutes les autres ressources
nécessaires pour le bison,
c'est-à-dire l'eau, de la bonne
herbe, de l'abri, c'était
isolé, c'était loin des autres
fermes. Donc, les animaux
seraient à l'aise. Et puis on a
décidé de se lancer dans cette
entreprise. Fait qu'on s'est
vite mis à faire des clôtures,
puis à chercher des animaux
de fondation du troupeau.
GISÈLE QUENNEVILLE
C'est un animal qui a
une longue histoire, je pense,
en Saskatchewan, n'est-ce pas?
MICHEL DUBÉ
On dit souvent que c'est
l'animal... c'est la viande
rouge, la protéine rouge
originale de l'Amérique du Nord,
pas juste de la Saskatchewan.
Donc, il est très, très bien
adapté au climat. Et puis, c'est
un animal qui est très résistant
à toutes les maladies connues
dans l'industrie du boeuf,
par exemple. Donc, peu
de soucis de ce côté-là.
GISÈLE QUENNEVILLE
Est-ce que c'est
rentable, le bison?
JOSÉE BOURGOIN
Il y a des années que ça
l'était pas. Ç'a été des années
quand même difficiles avec tout
ce qu'il y a eu: la fermeture
des frontières pour la vache
folle, par exemple. Bien, ç'a
affecté le bison, ç'a affecté
les prix. Puisque c'est pas
nécessairement dans tous
les magasins, ça n’a pas une
disponibilité très grande, donc
je pense que pendant longtemps,
ç'a été difficile juste par
le fait que c'était pas très
connu et pas très accessible.
Alors de plus en plus,
on commence à voir une plus grande
ouverture au bison, les gens en
cherchent de plus en plus. Alors
oui, je pense que c'est de mieux
en mieux. Mais c'est encore
une industrie en voie de
développement en général.
GISÈLE QUENNEVILLE
Comment on apprête le bison?
Est-ce que c'est comme un
steak, finalement? Josée?
JOSÉE BOURGOIN
Moi, comme je dis à tout
le monde, je pense qu'il y a eu
de la drôle de publicité. Pas
de la fausse, mais de la drôle
de publicité autour de comment
apprêter la viande. On a tous eu
un peu peur d'apprêter le bison
parce qu'on s'est fait dire:
"Ah oui, mais il faut pas trop",
"Ah oui, mais il faut cuire",
"Faut pas..." Mais dans le fond,
moi je dis: "C'est très, très
simple. C'est comme le boeuf.
Si vous êtes incertain, on prend
le thermomètre à viande qui est
toujours notre ami fidèle
à la bonne cuisson." Et puis
ça s'apprête de toutes les mêmes
façons qu'on ferait le boeuf.
Et puis comme n'importe qui
qui est créatif, on peut
en imaginer d'autres.
GISÈLE QUENNEVILLE
Est-ce qu'il y a des coupes?
Des différentes coupes
de bison comme le boeuf?
MICHEL DUBÉ
Ici, dans l'Ouest, puis, je
pense, à peu près n'importe où
en Amérique du Nord, il y a pas
de bouchers qui sont spécialisés
dans des coupes... à faire
des coupes différentes pour
le bison. Fait que le bison est
essentiellement coupé à peu près
de la même façon que le boeuf.
C'est une viande qui est très,
très dense. Il y a pas de
membrane entre les muscles.
Fait que ça se cuit pas de
la même façon. C'est-à-dire,
la viande ne cuit pas de
la même façon à l'intérieur.
Les molécules sont beaucoup plus
denses, donc la viande continue
à cuire longtemps après que tu
l'aies enlevé du feu. Fait que
si tu fais l'erreur de l'enlever
médium, bien par le temps que
tu le mets à la bouche...
GISÈLE QUENNEVILLE
Ça va être bien cuit.
MICHEL DUBÉ
Ça va être trop cuit.
GISÈLE QUENNEVILLE
J'aimerais parler de vous
autres, maintenant. Michel,
vous, vous êtes Fransaskois,
natif de pas très loin d'ici,
n'est-ce pas?
MICHEL DUBÉ
Oui, oui. Je suis né à Duck Lake,
en fait, qui est à une trentaine
de kilomètres l'autre côté
de Prince Albert.
GISÈLE QUENNEVILLE
Puis c'est comment, Duck Lake?
Ça ressemble à quoi?
MICHEL DUBÉ
Bien, Duck Lake, c'est un
petit village rural, un peu sur
la lisière... dans une région
très, très historique pour
la Saskatchewan, avec l'histoire
des Premières Nations,
des Métis, l'arrivée des
francophones. Puis c'était
un village qui était
essentiellement fondé par
des francophones. C'est un petit
village rural qui, à l'époque,
était un centre... je parle,
au début du 20e siècle, quand la
majorité des colons francophones
sont venus, c'était un village
qui était très important
au niveau de... Il y avait
le bureau de poste, il y avait
plein, plein de choses qu'un
village normal avait, le chemin
de fer, des boulangeries,
des laiteries, toutes sortes
de choses.
JOSÉE BOURGOIN
Ils disaient que dans le
temps, c'était la plus grande
métropole à l'ouest de Toronto.
GISÈLE QUENNEVILLE
Je suis pas sûre.
JOSÉE BOURGOIN
C'est pas tout à fait
la réalité aujourd'hui.
MICHEL DUBÉ
Mais c'est comme ça que
ça s'est passé, puis--
GISÈLE QUENNEVILLE
Mais c'était important,
comme village.
MICHEL DUBÉ
Oui, c'était important.
C'était le bout du chemin de fer.
Puis c'était où est-ce qu'un
grand nombre de francophones
se trouvait venant de l'Est...
de l'Est canadien ou
même l'Est américain. Duck Lake,
c'est un petit village qui a
beaucoup perdu dans son identité
francophone au cours des
décennies, malheureusement.
Mais c'est ça que c'est.
GISÈLE QUENNEVILLE
Michel est de Duck Lake,
Josée est Acadienne.
JOSÉE BOURGOIN
Oui.
GISÈLE QUENNEVILLE
Alors Josée, comment
est-ce que vous, vous vous
êtes retrouvée ici?
JOSÉE BOURGOIN
Oh, c'est une longue histoire,
disons. Mais je suis assez
aventurière de nature, donc
pour moi, venir dans l'Ouest,
c'était une question d'aventure,
de découverte et puis je suis
venue travailler dans la
pourvoirie dès ses débuts
avec Michel. Et puis bon, après
quelques semaines, ou quelques
mois, je sais pas tout à fait,
il y a quand même des jours qui
m'échappent, mais on est devenus
un couple et puis je suis restée
en Saskatchewan. On a...
MICHEL DUBÉ
Je peux vous dire: c'était
six semaines, trois jours
et deux heures.
JOSÉE BOURGOIN
Il s'en souvient, lui.
MICHEL DUBÉ
Non, c'est...
GISÈLE QUENNEVILLE
Mais là, l'Acadie,
la Saskatchewan, c'est
pas pareil pantoute.
JOSÉE BOURGOIN
Non, non.
GISÈLE QUENNEVILLE
Alors est-ce que ç'a été
difficile de vous
adapter à la plaine?
JOSÉE BOURGOIN
Bien, j'étais de Montréal à ce
moment-là. J'avais déjà un peu
quitté les vents de l'Est.
Et puis quand je suis venue ici,
bien, disons que les champs de blé,
le roulement du vent sur
les champs de blé, ça me faisait
beaucoup penser à l'océan, puis
les grands ciels vastes aussi.
Donc, il y avait un petit...
un petit côté chaleureux que
j'ai ressenti à déménager en
Saskatchewan. On s'est bien
adapté. Moi, je me suis
très bien adaptée.
GISÈLE QUENNEVILLE et le couple MICHEL et JOSÉE sont maintenant à l'extérieur dans un grand champ enneigé.
GISÈLE QUENNEVILLE
Michel, Josée, il y a quelques
instants, il y avait un troupeau
de bisons qui a traversé
ce champ-là. C'est peureux,
ces bêtes-là?
MICHEL DUBÉ
Oui, c'est une bête qui est
naturellement peureuse qui...
encore en état sauvage. Parce
que comme vous voyez, on les
laisse aller toute l'année dans
des grands champs. Fait qu'ils
sont instinctivement peureux.
Deuxièmement, le troupeau qu'il
y a ici, c'est un troupeau qui a
des veaux. Ils sont encore
avec les mamans. Les mamans sont
tout de suite alertées, puis
veulent toujours s'éloigner
pour protéger les petits.
C'est naturel.
Pendant la conversation, on présente le troupeau de bisons dans son habitat d'élevage.
GISÈLE QUENNEVILLE
Est-ce que c'est
dangereux, un bison?
JOSÉE BOURGOIN
Disons que c'est plus gros que nous.
GISÈLE QUENNEVILLE
C'est énorme.
JOSÉE BOURGOIN
Donc c'est quand même
une grosse bête et puis
à se défendre, ça pourrait
être dangereux. Mais ils ont
plutôt l'instinct de fuir
que d'attaquer. On se sent pas
à risque, mais on est toujours
soucieux du danger.
MICHEL DUBÉ
Ils ont tendance à fuir,
mais s'ils sont coincés,
c'est là qu'ils deviennent
dangereux. S'ils sont pris dans
un coin de clôture ou dans un
clos ou entre des humains ou des
choses comme ça... Parce qu'ils
sont super rapides, hein.
Ils peuvent courir plus
vite qu'un cheval.
Ils peuvent tourner sur
360 degrés sur une patte.
Fait qu'ils sont très, très
facilement déplaçables. Puis
moi, j'ai été assez chanceux.
Nous, on a été assez chanceux.
Mais j'ai un ami qui s'est fait
virer de l'autre bord de la
clôture une couple de fois.
On retourne dans la boutique pour la suite de l'entrevue.
GISÈLE QUENNEVILLE
Josée, Michel, vous vivez
tout près de Prince Albert.
Est-ce que vous arrivez à vivre
en français en Saskatchewan?
MICHEL DUBÉ
Bien, je pense que oui. Je
veux dire, c'est toujours un...
Faut être toujours conscient
que si on veut vivre en français
en Saskatchewan, il faut plus
d'efforts qu'ailleurs, c'est sûr.
Mais nous, on vit...
Personnellement, dans nos vies
personnelles, on vit à 90% du
temps en français. Nos amis sont
francophones... Il y a comme
une communauté francophone
À Prince Albert qui est active,
qui offre des activités toutes
les semaines, si on veut,
en français, des spectacles,
du cinéma, de la bouffe,
des rencontres sociales...
JOSÉE BOURGOIN
Des dégustations.
MICHEL DUBÉ
Des dégustations de bière,
de vin. Il y a beaucoup,
beaucoup d'activités culturelles
francophones. Puis on fait
partie d'un réseau fransaskois
de spectacles, puis de tournées,
de théâtre et tout ça. Ça fait
qu'il y a toujours de quoi
à faire en français. Il y a une
école française pour les jeunes
familles, donc une garderie
française. Puis notre parenté
est essentiellement toute
francophone. Donc, c'est ça.
On peut vivre en français,
mais c'est sûr, les affaires
se font en anglais, puis...
GISÈLE QUENNEVILLE
Diriez-vous que vous êtes
l'exception plutôt que la règle,
par exemple, en Saskatchewan?
JOSÉE BOURGOIN
Je pense que beaucoup
de francophones cherchent
à se rallier de francophones.
Donc, on est probablement pas
l'exception parce que quand
on participe à ce grand réseau
fransaskois, c'est sûr qu'on
retrouve pas mal les mêmes
visages. Mais on remarque que ce
sont des gens qui côtoient des
francophones particulièrement.
En grande ville, c'est sûr
que c'est probablement un peu
plus difficile de garder
un cercle francophone plus
restreint. Et puis de vivre
en français, c'est vraiment de
s'impliquer, aussi. Donc, comme
moi et Michel, on s'implique
énormément dans tous
les différents réseaux
de la Fransaskoisie.
GISÈLE QUENNEVILLE
Alors, quand on a des
si petits villages, comment
est-ce qu'on peut faire vivre
une école, par exemple?
JOSÉE BOURGOIN
Très bonne question. Parce que
c'est sûr que quand...
L'évolution du système scolaire
a été quand même tardive. Puis,
disons, s'ils avaient essayé
de faire ce réseau scolaire là
dans les années 60, on aurait
probablement perdu beaucoup
d'écoles par manque de
population. Les communautés qui
ont survécu ont quand même une
population environnante qui ont
permis de renflouer nos écoles.
Puis d'ailleurs, ce qui est beau
à voir, c'est qu'aujourd'hui, de
plus en plus, ce sont les écoles
qui sont en plus grande
croissance ici, en Saskatchewan;
c'est des écoles fransaskoises.
GISÈLE QUENNEVILLE
Et c'est dû à quoi, ça?
JOSÉE BOURGOIN
L'intérêt du fait français,
des gens qui veulent revenir à
leurs sources francophones, les
nouveaux arrivants qui arrivent.
Il y a un quota, si vous voulez,
de francophones qui est recruté.
Alors ça aussi, ça renfloue
nos écoles.
MICHEL DUBÉ
Je pense aussi, pour ajouter
À ça, c'est que les francophones
ont pris le contrôle
de leurs écoles en...
... bien, officiellement
en 1995, à peu près. Mais
les démarches avaient commencé
déjà en 1988, puis et cetera.
Là, il y a un peu une paix qui
s'installe autour de l'existence
des écoles francophones.
Alors qu'au début, c'était des
déchirements carrément dans les
villages où il y avait beaucoup
de monde qui... Parce qu'il y
avait toujours une école dans
le village. Mais t'as le choix
de l'immersion ou carrément
anglaise. Et quand on établit
des écoles françaises dans
les différentes communautés
d'origine francophone
fransaskoise, il y a eu des
divisions. Ce qui fait que dans
certains cas, ç'a pas réussi.
Il y a des villages comme
Willow Bunch où l'école a carrément
été fermée pour toutes sortes
de raisons: francophones,
dépeuplement, vieillissement
de la population.
JOSÉE BOURGOIN
Puis pour nous, les
francophones en Saskatchewan
sont... Bon, c'est quoi? On a
13 communautés. Les 11 des
13 communautés sont en milieu
rural. Ou disons 10 parce
que Prince Albert, c'est pas
nécessairement rural. Alors
on a, disons, une inquiétude
particulière pour notre culture,
pour le fait français, pour sa
survie et pour, aussi, la survie
de ces communautés-là. Si
on peut trouver des solutions,
on peut aussi peut-être
les transposer, les partager
avec d'autres qui ont les mêmes
difficultés ou les mêmes
problématiques au niveau rural.
GISÈLE QUENNEVILLE
Et quelles sont les solutions?
Est-ce qu'il y a des choses
qui sont déjà en marche?
JOSÉE BOURGOIN
Eh bien nous, on a fait
beaucoup de recherche à travers
l'association provinciale
qui s'appelle l'Assemblée
communautaire fransaskoise.
Michel en était président
pendant quatre ans et impliqué
pendant dix ans. Là, c'est
moi qui suis impliquée.
On prend chacun notre tour.
Et on a fait beaucoup de
recherche, comme on a dit,
en France, entre autres et dans
Charlevoix pour savoir comment
ces communautés, qui ont souvent
des communautés... petites
communautés rurales, comment
ils ont fait pour se distinguer,
se mettre un peu sur la carte
et de montrer aux gens qu'ils
existaient. Puis c'est par
les produits du terroir qu'on a
réalisé qu'en rajoutant la valeur,
même à la ferme, peut garder
de l'intérêt non seulement
de rester en milieu rural,
mais d'attirer les urbains,
peut-être de venir
nous visiter et aussi peut-être
trouver des solutions à garder
les familles. On sait que
l'agriculture aujourd'hui, aussi
vastes et aussi grandes sont les
fermes, c'est vraiment fait pour
être prospère pour une famille
en général. Alors, tous les bons
fermiers qui veulent voir leurs
enfants reprendre les terres,
ils perdaient espoir. Et
on essaie d'éduquer les gens
pour leur faire voir qu'on est
capable de faire un retour
à la ferme, mais il faut
trouver des alternatives.
Et ces alternatives-là,
c'est de rajouter de la valeur
au produit brut.
On présente la boutique de l'extérieur puis de l'intérieur ainsi que les produits spécifiques qui y sont vendus.
GISÈLE QUENNEVILLE poursuit l'entretien avec MICHEL DUBÉ et JOSÉE BOURGOIN.
GISÈLE QUENNEVILLE
Quand on parle de terroir,
terroir de la Saskatchewan
par exemple, on parle de quoi?
Quels sont les produits que
vous voulez mettre en vedette
dans votre coin de pays?
MICHEL DUBÉ
Bien, il y en a plusieurs.
C'est surprenant. Même nous--
GISÈLE QUENNEVILLE
À part votre bison, bien sûr.
MICHEL DUBÉ
À part du bison, c'est sûr.
Mais non, il y en a beaucoup
avec lesquels on a appris
à connaître ou à travailler.
Évidemment, il y a toutes sortes
de champignons sauvages, de riz
sauvage, il y a du sirop
de bouleau, le genre de sirop
d'érable de la Saskatchewan;
du sirop de bouleau qui est
comme un sirop d'érable. Il y a
les fameuses moutardes de
Gravelbourg. D'ailleurs, on se
fait toujours des petites farces
là-dessus. On va en Europe,
puis la Saskatchewan, c'est
une exportatrice de moutarde
en grande, grande quantité. Et
la moutarde Dijon, finalement,
c'est de la moutarde faite...
GISÈLE QUENNEVILLE
De nos grains.
MICHEL DUBÉ
... poussée en Saskatchewan.
Fait que la moutarde
est bien populaire.
GISÈLE QUENNEVILLE
C'est que vous avez
un problème de marketing,
finalement.
MICHEL DUBÉ
Oui, c'est ça. C'est comme
Paris est éclairé... ville
de la lumière, c'est l'uranium
de la Saskatchewan qui nourrit
les trucs là-bas.
Anyways, fait qu'il y a plein de...
Évidemment, les fameux
Saskatoon, les amélanchiers,
en bon français.
GISÈLE QUENNEVILLE
Les amélanchiers?
Je savais pas ça.
JOSÉE BOURGOIN
L'arbre, c'est l'amélanchier.
Le fruit, c'est l'amélanche.
MICHEL DUBÉ
Fait que ça, c'est un peu
notre marque de commerce en
Saskatchewan. Tout le monde...
la plupart des gens
connaissent les Saskatoon.
JOSÉE BOURGOIN
Il y a le riz sauvage, évidemment.
C'est le numéro 1 au monde,
finalement, le plus beau grain.
Tu sais veut dire, on peut parler
des petits fruits parce
qu'il y en a de toutes sortes.
Même l'argousier qui est
quelque chose que Michel et moi
avons, disons, travaillé un peu,
mais surtout Michel.
Fait qu'on s'implique dans--
GISÈLE QUENNEVILLE
L'argousier?
JOSÉE BOURGOIN
L'argousier, oui.
GISÈLE QUENNEVILLE
C'est quoi, ça?
JOSÉE BOURGOIN
En anglais, ça s'appelle le
seabuckthorn. C'est un petit
fruit orange, qui est une plante
médicinale, connue médicinale
par les pharmaceutiques aussi,
si vous voulez. Un super fruit
qui est en voie
de développement en plus.
GISÈLE QUENNEVILLE
Alors, comment est-ce qu'on
prend tous ces produits-là,
puis on traduit ça en une marque
de commerce? C'est sûr
que ça se fait en France
avec les appellations
contrôlées, par exemple. Dans
Charlevoix, on a mentionné, au
Québec, ça se fait. Comment vous
prenez tout ce que vous avez
et vous le vendez au monde?
MICHEL DUBÉ
Bien, nous, c'est sûr qu'on a
un petit magasin ici qui vend
que des choses faites ou
fabriquées... poussées en
Saskatchewan. Mais pour répondre
plus directement à la question,
c'est là où on en est un peu
dans la communauté fransaskoise
entre autres, c'est: comment
est-ce qu'on distingue
nos produits? Comment est-ce
qu'on met en valeur les produits
d'origine francophone ou qui
a un terroir autour d'un village
de Fransaskois. Côté anglophone,
À peu près... Josée pourra
peut-être me corriger parce
qu'elle a plus d'expérience,
mais les produits qui sont
de valeur ajoutée terroir en
Saskatchewan sont mis en marché
quasiment individuellement.
C'est-à-dire, il y a peu de
collaboration, il y a peu de
liens qui se font consciemment
entre le produit, le terroir,
la communauté. Donc, c'est pas
utilisé comme un outil
de développement.
GISÈLE QUENNEVILLE
Alors vous, vous voulez
rattacher ça à la communauté
francophone de la Saskatchewan?
JOSÉE BOURGOIN
Bien, il y a plusieurs raisons.
Il faut peut-être prendre
un peu de recul pour
voir le pourquoi du terroir
parce que dans l'ensemble
du terroir, c'est de vraiment
développer des produits dont
on est fiers. Une fois qu'on a
quelque chose de chez nous qui
est valorisé, bien, on en est
fiers. Puis ce sens de fierté là
fait qu'on a un sens identitaire
renforcé. Alors, c'est cet
échange-là qu'on cherche
toujours, cette dynamique, cette
synergie entre le produit et
le consommateur, entre le rural
et l'urbain. On essaie de créer
des ponts et des liaisons
qui nous permettent de faire
valoir et de redynamiser
justement les communautés, que
ce soit un produit ou plusieurs.
Ça nous permet aussi
d'encourager les gens de
concevoir, surtout l'agriculture
en Saskatchewan, qui est
tellement cette agriculture
de grande surface, cette
agriculture industrielle,
de voir ou donner passion aux
gens de retourner puis de dire:
"Bien, on est capables
d'en sortir une biodiversité,
d'en ressortir un produit
peut-être à plus petite
échelle." Donc, pas être obligé
de penser qu'on doit avoir
10 000 acres ou 20 000 acres
pour faire une vie en
agriculture, mais qu'on est
capable de le faire peut-être
avec 10 acres ou 15 ou 20 ou 50.
GISÈLE QUENNEVILLE
Comment c'est reçu
jusqu'à maintenant?
MICHEL DUBÉ
Bien, ç'a été bien.
C'est-à-dire, les gens
commencent à comprendre...
GISÈLE QUENNEVILLE
Ce que c'est.
MICHEL DUBÉ
Ça nous prend un outil, ça
nous prend vraiment une approche
globale comme le terroir,
comme le développement
à valeur ajoutée. Non seulement
le produit agricole,
mais ça peut être des articles
de bois, ça peut être
l'utilisation d'une laine
spéciale qui vient du coin ou
par une petite madame qui a une
histoire intéressante. Fait que
ça, ils commencent à comprendre
ça, sauf qu'il y a d'énormes
obstacles. En Saskatchewan, il
faut être... et juste même chez
les Fransaskois, les distances,
comme vous avez mentionné,
l'imposition ou la prédominance,
je devrais dire, de cette
industrie agricole à grande
échelle qui est installée
depuis des décennies déjà.
GISÈLE QUENNEVILLE
Ça fait partie de la mentalité.
MICHEL DUBÉ
Ça fait partie de notre mentalité.
C'est beau, en même temps.
C'est un pour puis un contre.
GISÈLE QUENNEVILLE
Oui.
MICHEL DUBÉ
Et donc l'idée est bien
acceptée. C'est de la mettre en
pratique qui est le gros défi.
Et pour la mettre en pratique,
bien ça prend des ressources,
ça prend des spécialistes,
ça prend des gens qui ont
des visions qui peuvent rester
en place assez longtemps pour
transmettre cette vision-là à un
nombre grandissant de personnes
pour que ça ait un impact,
que ça change vraiment. Parce
que c'est un changement social
très important. On a vu des
expériences qu'ils ont faites
à Charlevoix, qu'ils
ont faites à l'Aubrac...
JOSÉE BOURGOIN
C'est fantastique.
MICHEL DUBÉ
Ç'a été fantastique,
mais ç'a été du travail sur
20, 30, 40 ans. Fait qu'on est
dans le début, en fait, madame,
pour répondre à votre question.
GISÈLE QUENNEVILLE
Vous avez commencé avec votre
boutique ici. On regarde autour
de nous: il y a des produits
du terroir de la Saskatchewan
ici, autour de nous. Vous voulez
amener ça où? Vous voulez
votre boutique, bien sûr, mais
votre vision à plus long terme,
à quoi ça ressemble?
JOSÉE BOURGOIN
Bien, la vision que moi j'ai...
Disons que moi, j'aimerais voir
que le produit fransaskois
ressorte dans tous ces
produits-là. On cherche à
développer un label fransaskois.
C'est qu'on veut vraiment
pouvoir faire valoir la culture
parce que cette distinction-là
va permettre à la majorité de
voir que non seulement c'est
un produit de la Saskatchewan,
mais wow, c'est un produit
francophone, d'ici.
MICHEL DUBÉ
On sait tous que peu importe
la minorité, il y a toujours
ce complexe de minoritaire.
GISÈLE QUENNEVILLE
D'infériorité, absolument.
MICHEL DUBÉ
On s'est fait un peu...
malmener depuis... peu importe
qu'on parle des Fransaskois
ou des Franco-Ontariens ou des
Acadiens. En créant ce label
fransaskois là, c'est de donner
un sens d'identité. Parce qu'on
se fait pas d'illusion.
Comme fransaskois, on peut pas
vivre que de la population
fransaskoise dans la vente de
nos produits. On a besoin de la
grande population. Mais je pense
qu'à l'intérieur de cette grande
population-là, on peut créer
une dynamique francophone qui va
être valorisante, donc qui va
être un outil contre cette
pensée d'infériorité qu'on a.
C'est ça la clef, je pense.
C'est ça. La clef du label
fransaskois, ça va être vraiment...
C'est une autre institution
qu'on crée, comme
les écoles ou les centres
culturels. C'est un autre outil
de fierté et de développement
que les francophones auront,
puis que les anglophones auront
aussi. Parce qu'ils vont
voir que c'est bon.
GISÈLE QUENNEVILLE
Et est-ce que vous vous êtes
donné des objectifs ou
des échéanciers à respecter
pour faire avancer le projet?
JOSÉE BOURGOIN
On s'est donné certains
objectifs. Des échéanciers,
je pense que c'est dur de cibler
des échéanciers à moins qu'on
tombe dans des programmes de
financement. Alors, on a des
échéanciers très, très précis.
On a présentement des projets
où on met un marché virtuel
en place. On est très bien
structurés en Fransaskoisie
pour pouvoir avoir des points
de dépôt dans toutes nos
communautés. Alors, on est
en voie de développement.
On a des concertations assez
régulièrement avec d'autres
producteurs pour faire la mise
en marche et la mise en valeur
de nos produits. Ça s'en vient.
On s'attend de voir un site Web
d'ici les prochains 12 mois.
GISÈLE QUENNEVILLE
Ce sera pas long, on pourra
acheter vos produits en
Ontario, en Acadie, au Québec?
MICHEL DUBÉ
Il y a quelques autres, pour
pas dire plusieurs, quelques
autres communautés francophones
en situation minoritaire
qui étudient ce qui se passe
ici, qui ont entendu parler
beaucoup... On parlait de la
Louisiane tout à l'heure, il y a
beaucoup d'intérêt chez les
Cajuns de ce qui se passe ici.
Parce qu'ils sont même venus
voir, Zackary Richard est même
venu ici, puis il y a eu des
professeurs d'université qui
sont venus, des chercheurs
qui s'intéressent.
JOSÉE BOURGOIN
Il y a de plus en plus de gens
qui cherchent à puiser peut-être
de nos acquis, de nos défis,
de savoir un peu de notre
expérience, comment ils peuvent
s'y prendre eux aussi pour
faire valoir non seulement
leur culture, mais leur
communauté rurale.
GISÈLE QUENNEVILLE
Eh bien, Michel, Josée, c'est
un beau projet. On vous souhaite
bonne chance et merci beaucoup.
JOSÉE BOURGOIN
Merci à vous.
MICHEL DUBÉ
Merci à vous.
Générique de fermeture
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