

Carte de visite
Gisèle Quenneville, Linda Godin and Daniel Lessard meet exceptional francophones from throughout Canada and beyond. Discover politicians, artists, entrepreneurs and scientists whose extraordinary stories are worth telling.
Video transcript
Guy Matte: Canadian Foundation for Cross-Cultural Dialogue
Guy Matte, Executive Director at the Canadian Foundation for Cross-Cultural Dialogue, has dedicated much of his life to defending the rights of Francophones in Ontario and other parts of the country.
He dreams of the day when Francophones will take their rightful place, unapologetically, not only in the higher ranks of public administration, but also in the private sector and, above all, in traditional and social media.
Réalisateur: Charles Pepin
Production year: 2015
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Carte de visite
On se promène dans la ville d'Ottawa en hiver pendant la courte présentation que l'animateur DANIEL LESSARD fait de GUY MATTE, directeur général de la Fondation Canadienne pour le Dialogue des Cultures.
DANIEL LESSARD (Narrateur)
Guy Matte a toujours préféré
travailler dans l'ombre. Impliqué dans
des dizaines d'organismes
communautaires, ancien
président syndical,
il a surtout défendu
les droits des francophones.
Il rêve du jour où ces derniers
prendront toute la place qui
leur revient sans s'excuser,
et non seulement dans les hautes
sphères de l'administration
publique, mais dans l'entreprise
privée et surtout, dans les
médias traditionnels ou sociaux.
GUY MATTE (Narrateur)
On nous voit souvent comme
étant soit des Québécois en exil,
soit des victimes. Puis pourtant,
nulle part nous jouons le
rôle de victimes. Nous sommes
des participants dans la chose
publique dans chacune de
nos provinces et chacun
de nos territoires.
DANIEL LESSARD rencontre GUY MATTE dans une salle de réunion.
DANIEL LESSARD
M. Matte, bonjour.
GUY MATTE
Bonjour.
DANIEL LESSARD
Vous allez bien?
GUY MATTE
Très bien, merci. Et vous?
DANIEL LESSARD
Très bien. J'aimerais qu'on
commence par le commencement.
Vous êtes né à Saint-Ubalde,
dans le comté de Portneuf,
au Québec.
Quel souvenir vous en
gardez, de votre enfance?
GUY MATTE
Ah, c'est un tout petit
village qui se situe à mi-chemin
entre Québec et Shawinigan.
J'en garde... C'est comme une
magnifique vallée dans le comté
de Portneuf. J'y suis retourné
à plusieurs reprises.
C'est là que mon père est
enterré. Donc, j'ai encore des
cousins et des cousines. Et vous
savez, cette année, il y avait
une réunion de l'Association des
Matte et nous sommes allés faire
des voyages dans ce milieu-là,
parce que c'est le berceau de
la famille Matte en Amérique.
DANIEL LESSARD
Vous avez fait vos études là?
Élémentaire, secondaire.
GUY MATTE
Pas secondaire, non, non.
Élémentaire, à peine. à peine
élémentaire, parce qu'on
a déménagé à Montréal peu après.
Mon père avait une ferme, on
vivait... Dans ce temps, c'était
la pauvreté épouvantable, dans
des petites fermes, quelques
vaches, quelques cochons.
DANIEL LESSARD
Mais bonne éducation,
bon milieu. Vous en gardez
que de bons souvenirs--
GUY MATTE
Vous savez, l'éducation, c'est
un petit peu dur, là-dessus,
parce que moi, j'ai pas
d'études secondaires.
J'ai pas terminé mes études
secondaires. J'ai pas de
diplôme d'école secondaire.
J'en ai jamais eu, d'ailleurs.
Et... j'ai quitté l'école pour
aller dans le milieu du travail.
Vous savez, à l'époque, on
était milieu des années 60...
En tout cas, on était... Dans
ce milieu-là, très souvent on
quittait l'école avant même
la fin, et c'était mon cas, pour
aller travailler dans toutes
sortes d'entreprises manuelles.
Et... Mais par après, j'ai
repris des études, mais
à ce moment-là... J'avais
arrêté à ce moment-là.
DANIEL LESSARD
À 16 ans, vous déménagez
en Ontario, pourquoi?
GUY MATTE
Bien, à un moment donné,
il faut quitter la famille,
le petit nid familial. J'avais
quand même, moi, cinq frères et
soeurs. Donc, dans les logis
de Montréal, à ce moment-là,
c'était assez exigu.
Et puis il fallait avoir...
DANIEL LESSARD
Voler de ses propres ailes.
GUY MATTE
Il fallait voler un peu.
Alors, j'ai dit: "Je m'en vais
à Vancouver." Tant qu'à partir
loin de la maison, on s'en
va à Vancouver.
DANIEL LESSARD
Donc, Vancouver d'abord.
GUY MATTE
Vancouver d'abord. Mais c'est
évident que quand t'as pas de
diplôme d'études secondaires,
que tu parles à peine
l'anglais... la limite,
ça a été Ottawa.
(En riant)
J'ai pas pu me
rendre jusqu'à Vancouver.
DANIEL LESSARD
Qu'est-ce que vous avez fait
à Ottawa en arrivant à 16 ans?
GUY MATTE
Ici, j'ai travaillé dans une
compagnie d'assurances, qui
s'appelait le Zurich Insurance
company, pendant quatre mois.
Et après, j'ai eu la chance
d'être embauché à la
bibliothèque du Parlement.
Ça, ça a été une
magnifique expérience.
DANIEL LESSARD
Comme?
GUY MATTE
Placeur de livres. Donc,
j'avais à aller chercher les
livres pour les parlementaires
qui venaient, être à la
réception à quelques reprises.
Mais c'était... Vous savez,
quand on n'a pas de diplôme
secondaire encore, on n’était pas
bibliothécaire. Mais j'aimais
beaucoup les livres, j'aimais
beaucoup la lecture. J'ai trouvé
ça un milieu fascinant, mais
pas simplement au niveau de
la lecture, mais certainement
comme éveil politique.
DANIEL LESSARD
À partir de quel moment
vous êtes retourné aux
études et vous avez fait
le cheminement qui vous a
emmené jusqu'à l'enseignement?
GUY MATTE
Après avoir placé des livres,
des centaines et des milliers de
livres, je me suis dit: Bien,
c'est peut-être pas ce que je
veux faire le restant de mes
jours et je suis retourné à
l'université. L'université
prenait, à ce moment-là,
des étudiants adultes.
Comme j'étais considéré comme
adulte, on m'a fait passer une
propédeutique quelconque pour
voir si je pourrais suivre
des études universitaires.
Et j'ai fait tout de suite...
On faisait dans ce temps-là,
l'enseignement, ça se faisait
dans un an. On faisait des
études dans un an. Alors,
j'ai pris un an à l'université.
DANIEL LESSARD
À l'Université d'Ottawa?
GUY MATTE
Un an à l'Université d'Ottawa.
Et après, j'ai commencé dans
le système d'éducation.
DANIEL LESSARD
Quelle constatation vous
avez fait au niveau de la langue
quand vous êtes arrivé, disons,
en Ontario? Vous qui parliez à
peine anglais. Ça s'est amélioré
depuis que vous êtes
arrivé? C'est mieux?
GUY MATTE
Vous savez, il y a un dicton
qui dit: "Quand on s'analyse, on
se désole. Quand on se compare,
on se console." Et moi, je dois
dire que quand je regarde
ce qu'on vit aujourd'hui par
rapport à ce qu'il y avait
dans ce temps-là, il y a eu
une amélioration incroyable
quant à l'acceptation du fait
français partout dans ce pays.
Certainement dans notre région,
dans la province, mais partout
au pays, le fait français est
quelque chose qui est maintenant
vu comme étant, je dirais,
normal pour l'ensemble de
la population canadienne.
Moi, j'ai vu des changements
énormes. Il faut penser qu'il y
a pas longtemps, on avait la
majorité des premiers ministres
et des premières ministres
des provinces du Canada qui
pouvaient parler les deux
langues officielles. Et ils se
faisaient plaisir de le faire.
Alors, quand vous regardez ça,
c'est des grands changements
qui se sont passés au cours
des derniers 40 ans.
DANIEL LESSARD
Dû, et je vous amène à faire
un peu de politique, surtout
aux libéraux qui étaient
probablement, de David Peterson
à Bob Rae, à Kathleen Wynne
aujourd'hui, beaucoup plus
francophiles que les John
Robarts ou Bill Davis
de ce monde.
GUY MATTE
Oui, vous savez, j'ai tout
connu, ces gens-là. J'ai connu
Bill Davis. Euh... Il faut se
rappeler, il faut voir que
plusieurs des grands changements
qui se sont passés dans le
fait français en Ontario,
particulièrement en Ontario,
ont été le fait des
conservateurs aussi.
DANIEL LESSARD
Ah, oui?
GUY MATTE
Il faut pas oublier ça.
Écoutez, c'est sous le
gouvernement de M. Harris
que nous avons eu des conseils
scolaires de langue française.
DANIEL LESSARD
C'est vrai.
GUY MATTE
Et c'est sous le gouvernement
de Bill Davis que nous avons
eu le droit à l'éducation
en langue française dans
la province de l'Ontario.
Alors, il faut faire attention à
ne pas peindre de mauvaise façon
ce que nous avons eu ici.
Il faut voir qu'en Ontario, le
Parti conservateur est un parti
"progressiste" conservateur.
On faisait pas de vague.
"Pouvons-nous régler les
problèmes sans faire de vague?"
"Oui, on va le faire pour
vous, les francophones."
Si vous êtes dans la rue et que
vous faites: "Hum, ça va être
plus difficile pour nous. Bien,
parlons-nous, on peut trouver
des accommodements avec
vous." Et ils l'ont fait.
Vous regardez d'autres
gouvernements qui étaient très,
très, très sympathiques selon
eux, comme le gouvernement de
M. Rae, et ça a été énormément
difficile d'obtenir des choses
d'eux, parce qu'ils avaient
toujours peur de prendre
une décision.
C'était difficile de prendre une
décision sous le gouvernement
Rae. Ça a été l'enfer. On leur
disait: "Bien, dites oui, dites
non, mais dites quelque chose!
Faites-le! Tannés d'être consultés."
Alors, vous savez, cette
chose-là, il faut faire
attention comment la perception
entre la parole et l'acte,
quelquefois, il y a une
bonne différence.
DANIEL LESSARD
Vous parliez de la rue.
L'acceptation politique,
c'est une chose. L'acceptation
populaire, dans les milieux
très anglophones, en Ontario,
est-ce qu'il y a une
ouverture d'esprit?
GUY MATTE
Oui, mais regardez... Encore
là des bagarres qu'il y a dans
des milieux comme Guelph, qui
n'est pas quand même l'endroit
le plus francophone
de la province, les parents se battent,
à l'heure actuelle, avec
les conseils scolaires,
pour qu'on ait des services
d'immersion française.
Et regardez à travers la
province de l'Ontario, c'est le
patron que vous retrouvez à peu
près partout. Alors, il y
aura toujours une frange.
Vous savez, moi, je me suis
beaucoup battu au début des
années 90 avec ce qui s'appelait
l'Apec, qui était the
Association for the protection
of English in Canada, comme
si l'anglais avait besoin d'une
association pour le protéger.
DANIEL LESSARD
Ça existe toujours?
GUY MATTE
Il y en a un peu plus au
Nouveau-Brunswick, je pense,
de ce temps-là, où les CoR,
les Confederation of regions,
ou je sais pas quoi.
En tout cas, il y aura toujours
du grenouillage de ce type-là.
Il y en aura toujours.
Mais j'accepte, parce que
ça nous garde en forme aussi.
Parce que quand il y a des
gens qui sont comme ça, bien,
ça nous garde chez nous des
gens qui vont dire: "Ouais,
on va leur faire la bagarre à
ceux-là! Puis on va s'assurer
qu'ils gagnent pas."
Alors... Mais jusqu'à maintenant,
quand vous regardez
sur l'ensemble de la population,
quand vous voyez les sondages
qui sont là, vous voyez qu'il
y a une acceptation du fait
français, dans cette province
en particulier, et je pense
sur l'ensemble du territoire canadien.
On se retrouve à la bibliothèque du Parlement.
GUY MATTE (Narrateur)
Un de mes endroits préférés
à Ottawa, c'est la bibliothèque
du Parlement.
C'est un endroit, une
architecture extraordinaires.
J'y ai travaillé pendant deux
ans, presque deux ans et demi.
J'ai vu cet endroit-là
du deuxième sous-sol
jusqu'à la coupole.
Mais ce qui est plus important,
c'est que c'est là où se
situent toute la recherche et
la pensée politique de ce pays.
Quand on regarde tous les
politiciens qui sont autour, ça
entoure cette bibliothèque-là.
C'est comme le centre du savoir
de ce qui va se passer au niveau
du parlementarisme canadien.
C'est un endroit, moi, je pense,
qui mérite d'être visité
par tous les Canadiens
et toutes les Canadiennes.
On retourne dans la salle de réunion pour l'entretien entre DANIEL LESSARD et GUY MATTE.
DANIEL LESSARD
M. Matte, vous avez dit quelque part,
il y a pas si longtemps: "Les
francophones en Ontario et au
Canada doivent investir la
sphère publique." Qu'est-ce
que vous vouliez dire?
GUY MATTE
Tout est politique dans notre
monde. Peu importe ce que
nous allons faire, tout est
politique. Et les francophones
ne doivent pas être
différents des anglophones
ou des autres groupes d'investir
la sphère politique. Il faut
être présent dans les partis
politiques. Il faut être présent
aussi, non seulement au niveau
municipal, il faut être
présent au niveau des
conseils scolaires.
Il faut que nous soyons présents
dans ces milieux-là si nous
voulons affecter... si vous
voulez avoir des résultats
au niveau de ce que nous voulons
voir comme croissance au
niveau de notre société.
DANIEL LESSARD
Être présent, ça veut dire
se faire élire à la tête--
GUY MATTE
Se faire élire! Ça veut dire
se faire élire, mais ça veut
dire aussi être derrière les
politiciens. C'est-à-dire être
près d'eux, de les connaître,
de les aider à se faire élire.
C'est uniquement si nous sommes
présents tout le temps que
lorsque nous avons besoin
d'eux, ils vont être
capables de répondre.
Si la seule fois où on va
rencontrer les politiciens,
c'est toutes les fois où on a
une pancarte dans la main,
on dit: "Là, je réclame, je
réclame"... On va bien nous
recevoir, mais après, on
va nous laisser tomber.
Il faut être toujours présent
et les francophones
qui réussissent,
c'est parce qu'ils font ça.
DANIEL LESSARD
Un lobbying constant.
GUY MATTE
Constant.
DANIEL LESSARD
Sans jamais--
GUY MATTE
Il faut pas baisser les bras.
DANIEL LESSARD
L'éducation, M. Matte, c'est
peut-être le secteur où vous
avez été le plus longuement
impliqué: président de
l'Association des enseignants
franco-ontariens,
de l'Association des
enseignants de l'Ontario.
Au niveau de l'enseignement,
en Ontario, les progrès
sont considérables?
GUY MATTE
Oh, ça a été...
DANIEL LESSARD
Suffisants?
GUY MATTE
Écoutez, moi, quand j'ai
commencé à enseigner, c'était
les conseils scolaires qui
étaient des conseils scolaires
anglophones qui géraient
l'éducation en langue française.
Ou en tout cas, ils étaient
mixtes dans plusieurs cas,
mais souvent, des conseils
scolaires anglophones.
Alors, vous pouvez vous imaginer
de passer de ça à ce que nous
avons aujourd'hui, 13 conseils
scolaires de langue française
dans la province,
c'est un pas énorme.
Ça a permis de prendre
le contrôle de la qualité
de l'enseignement. Et quand vous
regardez aujourd'hui les
résultats des jeunes, dans nos
écoles de langue française, par
rapport à ce que nous faisions
il y a longtemps et par
rapport à ce que nos collègues
anglophones font, vous voyez
que nos écoles sont parmi les
meilleurs dans la province.
Les meilleurs résultats au
niveau de l'office de qualité et
de redevabilité. Tous les tests
qui sont présentés montrent que
nous sommes parmi les meilleurs,
les meilleurs résultats, et en
plus, le maintien des jeunes
à l'école jusqu'à la fin du
secondaire, ce qui est un
changement énorme par rapport
à ce que nous faisions dans le
passé. Donc, ça a été, d'après
moi... La prise en charge par
les francophones a démontré
que nous étions capables de
réussir quand on voulait.
DANIEL LESSARD
Ça a pas été facile à faire.
GUY MATTE
C'est pas facile à faire.
Ça a été des bagarres, mais
vous savez les bagarres,
ça renforce nos muscles.
DANIEL LESSARD
Vous avez l'air
d'aimer ça beaucoup.
GUY MATTE
Bien... Je veux dire, moi,
j'aime bien... Si tout nous
était donné, on prendrait
les choses pour acquis, puis
je pense que nos muscles
s'affaibliraient, puis on serait
plus résistant comme communauté.
DANIEL LESSARD
Donc, progrès considérables
en éducation. On peut dire
la même chose en santé
et en justice?
GUY MATTE
Je voudrais peut-être
revenir un petit peu sur
l'éducation, parce qu'il
faut pas oublier que l'éducation
élémentaire et secondaire, oui,
mais nous n'avons pas encore
terminé ce qu'on doit faire
au niveau postsecondaire.
Collégial, ça s'en vient un peu.
C'est pas mal. Universitaire, ça
doit se faire encore, parce que
nous avons de grandes zones qui
ne sont pas desservies. Tout
le sud et le centre-sud de
l'Ontario, c'est un vaste
désert, je dirais, pour
l'éducation postsecondaire,
à ce moment-ci.
Et il faut trouver des
solutions. Je pense que le
gouvernement actuel est positif
vis-à-vis de ça. Il faut que les
francophones s'entendent sur
quel système nous voulons avoir
là-bas pour que ça fonctionne.
DANIEL LESSARD
Santé et justice--
GUY MATTE
Santé et justice, là aussi,
nous avons eu de grands progrès.
D'abord, je veux dire en
justice, parce que c'est
grâce encore à un gouvernement
conservateur, sous M. McMurtry,
que le système de la justice--
DANIEL LESSARD
Vous m'en apprenez.
J'entretenais trop de clichés.
GUY MATTE
Je sais, il faut toujours
faire attention à ce qu'on pense
et à la réalité, mais c'est
vraiment sous un gouvernement
conservateur, sous M. McMurtry,
comme ministre de la Justice,
que toute la justice en français,
en Ontario, a été développée.
C'est lui qui a dit:
"Quand t'es justiciable dans
cette province, t'as le droit de
recevoir le service en français
au niveau de la cour, d'être
entendu par les juges qui vont
comprendre, par les procureurs
qui vont comprendre."
Donc, en justice, ça va bien. Et
de ce temps-ci, d'ailleurs, il y
a toute une nouvelle initiative
qui a été prise par le
gouvernement libéral, cette
fois-ci, par la ministre Mayer,
dans la région d'Ottawa, de voir
est-ce qu'on peut établir
le système de justice
à partir de l'entrée.
Donc, de la porte d'entrée
jusqu'à tant que vous entriez en
prison ou pour le civil ou peu
importe, que tout puisse se
faire en français, que vous avez
accès à tous les services.
Et il y a un très bon...
C'est le projet pilote qui
va prendre tout ça.
Alors, ensuite, on pourra
prendre le résultat de ça
et l'implanter ailleurs dans
la province de l'Ontario.
DANIEL LESSARD
Santé, depuis Montfort, on a
l'impression que tout est beau.
Quelques images tirées d'archives rappellent la bataille de l'hôpital Montfort à Ottawa.
GUY MATTE
Oh, bien, non! Non, non, tout
n'est pas beau dans le domaine
de la santé en français en
Ontario encore. C'est bien
à Montfort pour la région d'Ottawa,
mais il faut penser que l'Ontario,
c'est pas Ottawa. Il y a aussi Toronto,
il y a Penetanguishene, il y a
le nord de l'Ontario.
Et nous avons plusieurs petits
endroits... Je pense par exemple
à l'hôpital de Smooth Rock Falls
qui est en difficulté parce
que la municipalité descend
au niveau du nombre,
démographiquement, puis on
voudrait bien le fermer.
Mais là, la population résiste
parce que c'est le seul hôpital
en français que nous avons dans
ce milieu-là. On voit la même
chose, on vient de fermer le
petit hôpital de Penetanguishene
pour transformer ça à Midland,
où c'est en anglais. Alors là,
on avait ça en français, alors
ça va en anglais. Est-ce qu'on
va pouvoir garder les
services en français?
D'autres images nous amènent à l'hôpital général de la Baie Georgienne.
GUY MATTE
Alors, ce qui est important,
ce qu'on voit à l'heure actuelle
avec le gouvernement et le
ministre actuel de la Santé,
c'est une augmentation des
services. Comment est-ce
qu'on peut désigner, dans
les hôpitaux, des services en
français de façon que quand vous
arrivez, que ce soit normal, que
ce soit évident, que vous pouvez
être servi en français?
DANIEL LESSARD
C'est réalisable? C'est à
court terme, vous pensez?
GUY MATTE
Je pense que c'est réalisable,
parce qu'on a mis de plus en
plus en place des structures
qui permettent de le faire et
du développement de personnel.
Parce que ce qui manquait,
c'était des infirmières,
c'était des médecins
francophones qui pouvaient être
mis un peu partout dans la
province. Et là, maintenant, ça
se développe de plus en plus
et on a des structures
pour le faire.
DANIEL LESSARD
Vous n'êtes pas de ces
prophètes de malheur qui
prédisent l'extinction à
plus ou moins long terme
des francophones hors Québec?
GUY MATTE
Oh, mon Dieu!
Laissez-moi vous raconter une
petite histoire. Mme Payette,
qui était ministre du
gouvernement du Parti québécois
au début des années 90, avait
envoyé une lettre au
Devoir, je pense, en disant: "Oh, vous
savez, c'est épouvantable le
Canada. D'ici l'année 2020, mes
enfants, tout le monde ici va
parler anglais. On n'aura
plus de francophones."
Alors, j'avais envoyé une note à
la madame. J'avais dit: "Madame,
si vous, vos enfants, ils
parlent pas français, les miens
vont parler français encore en
2020." Et je suis très heureux
de vous dire qu'en date
d'aujourd'hui, mes enfants
parlent français, incluant
mes petits-enfants aussi.
Les francophones dans ce pays
y sont. Ils sont pour
demeurer. Écoutez, l'Empire
romain est mort après... Puis
on parle plus latin. Est-ce que
dans 1000 ans ce sera comme ça?
Est-ce que dans 200 ans ce sera
comme ça? C'est pas important.
Ce que je trouve important,
c'est que moi, et ceux de ma
génération, on a maintenu ce que
nos parents, nos grands-parents
avaient apporté et que je
confie à mes enfants et mes
petits-enfants ce même travail.
Et moi, je suis persuadé qu'eux
vont continuer à le faire.
Près d'un feu foyer, DANIEL LESSARD fait une parenthèse avec M. MATTE.
DANIEL LESSARD
M. Matte, parlez-moi de cette
Association des familles Matte,
dont vous êtes un participant
très actif, si je comprends bien.
Des archives personnelles de GUY MATTE illustrent le propos.
GUY MATTE
On a mis sur pied, oui, cette
Association des Matte parce que
nous sommes un peu dispersés,
comme beaucoup de familles
canadiennes-françaises sur
l'ensemble du territoire
canadien, mais aussi aux
États-Unis, en Louisiane, un peu
partout. Et il y a eu quelques
Matte qui se sont rencontrés.
On a dit: "Ce serait intéressant
de pouvoir réunir ces gens-là,
puis qu'on puisse voir quelles
sont nos origines et d'où
nous sommes maintenant."
Nous avons même un chef indien
qui est un Matte dans l'ouest
des États-Unis. Donc, on a
créé cette association il y a
maintenant un an, un an et
demi. Et on a fait un premier
rassemblement à Neuville, qui
était l'endroit original où
le premier Matte, Nicolas,
en 1665, quand il est venu
en Nouvelle-France, a établi
sa première terre. Et vous savez,
c'est une terre
assez intéressante, puisque
lui l'ayant défrichée, près de
400 plus tard, maintenant c'est
devenu quoi? Un vignoble!
DANIEL LESSARD
Ah, oui?
GUY MATTE
Mais cet homme,
quel ancêtre nous avions
qui pouvait savoir--
DANIEL LESSARD
Quel visionnaire!
GUY MATTE
Quel visionnaire! Maintenant
qu'on est allé, on a pu boire
du vin sorti de la terre de nos
ancêtres, ce qui était...
C'est magnifique.
Alors, c'est une organisation
qui se tient. On fait des
rassemblements à différents
moments. On prépare un
rassemblement aux États-Unis,
avec les Matte des États-Unis.
Et on prévoit pour un peu
plus tard un rassemblement
en Normandie, dans le
village ancestral.
On revient à l'entretien principal avec GUY MATTE, dans une salle de réunion.
DANIEL LESSARD
M. Matte, vous êtes directeur
général de la Fondation
canadienne pour le dialogue des
cultures. Avant de vous parler
de cette fondation-là, il y
a deux choses sur lesquelles
j'aimerais vous entendre.
Un, est-ce que la ville d'Ottawa
devrait être une ville bilingue?
GUY MATTE
Bien sûr qu'Ottawa devrait
être une ville bilingue!
Quand on regarde un pays comme
le nôtre où il y a deux langues
officielles, sa capitale
devrait être une capitale
officiellement bilingue.
DANIEL LESSARD
Et pourquoi ça ne l'est pas?
GUY MATTE
Je pense qu'il y a encore des
réticences... Deux sujets, deux
façons, je pense. Il y a une
réticence encore au niveau
politique, au niveau local,
parce que je pense qu'au niveau
provincial, le gouvernement
serait prêt à le faire s'il
y a une demande du niveau--
DANIEL LESSARD
Pourtant, le maire, M. Watson,
qui semble assez francophile,
ouvert...
GUY MATTE
Oui, mais vous savez,
M. Watson, que j'aime beaucoup,
bien francophile, oui, mais
c'est un personnage politique.
C'est quelqu'un qui ne veut
pas... Pourquoi brasser une cage
qui n'a pas besoin d'être
brassée? Qu'est-ce qu'on va
réveiller là-dedans tous
les animaux qui sont là, qui
dorment? Vous savez. Même si ça
voulait absolument rien dire
au niveau de coûts et ça voulait
rien dire au niveau de l'emploi,
il y a des gens qui voient
ça comme un drapeau.
Vous savez, les gens se tuent
pour des drapeaux dans certains
pays. Mais l'autre importance,
c'est qu'il faut que les
francophones parlent
d'une voix unie.
Quelle est cette demande
particulière? Ça veut dire
quoi, "Ottawa, ville bilingue"?
Qu'est-ce qu'on va demander
comme changement? Où est-ce que
ça demande des changements?
Alors, je pense que c'est là où
nous en sommes et on verra dans
les prochains mois si nous
réussissons comme opération,
comme francophones à faire ça.
DANIEL LESSARD
Le traitement que les médias,
en général, que ce soit Radio
Canada, TFO, Le Droit et
tous les autres, accordent à la
francophonie, c'est suffisant?
GUY MATTE
Ouh! Là, vous ouvrez un joli
dossier. Alors, je pense qu'il
ne faut pas mettre tous ces
groupes-là dans le même bateau.
Je vous dirais qu'il y a
certainement des résistances
ou des préoccupations au niveau
de Radio Canada, avec les
coupures qui ont eu lieu.
On a vu Radio Canada beaucoup
diminuer ce qu'il se faisait à
l'extérieur du Québec, mais pas
simplement diminuer ce qu'il se
faisait à l'extérieur du Québec,
mais la présentation de l'image
de l'extérieur du Québec
aux Québécois. Parce qu'il y a
une grande incompréhension
au niveau des Québécois vis-à-vis de
cette réalité que nous vivons,
nous, les francophones
de l'extérieur du Québec.
Vous savez, on nous voit souvent
comme étant soit des Québécois
en exil, soit des victimes. Et
pourtant, on joue pas, nulle
part nous jouons le rôle de
victime. Nous sommes des
participants dans la chose
publique, dans chacune
de nos provinces et chacun
de nos territoires.
On réussit à différentes
échelles, mais nous sommes des
participants et nous faisons
des actions, nous avons
toutes sortes d'organisations,
d'actions qui se passent.
Et je pense que ça vaudrait la
peine que dans ce pays, on sache
aussi au Québec ce qu'il se
passe à l'extérieur du Québec,
dans nos milieux, autant que
nous pouvons le connaître
par Radio Canada.
DANIEL LESSARD
Hum-hum.
GUY MATTE
Maintenant, si nous allons
dans les journaux comme
Le Droit, bien là, c'est
un journal à cheval sur une
frontière qui tente de
représenter les deux côtés,
je pense, de la rivière.
Et quelquefois, ça réussit
et quelquefois, non. Mais
de tous côtés, comme c'est
le seul journal que nous
avons, on y reste abonné.
DANIEL LESSARD
Parlez-moi de la fondation.
GUY MATTE
La Fondation canadienne pour
le dialogue des cultures, c'est
une bête qui a été formée par
la Fédération des communautés
francophones et acadiennes
du Canada.
DANIEL LESSARD
Par Guy Matte.
GUY MATTE
Guy Matte ne fait pas des
choses seul, Guy Matte, il
fait partie d'un ensemble.
C'est la fédération qui a
eu cette idée de créer une
fondation dont le but serait
d'augmenter l'appui à la dualité
linguistique, d'augmenter
l'appui aux communautés
francophones et acadiennes
en créant des liens avec
les autres communautés: les
Premières nations, les nations
autochtones, les anglophones,
les nouveaux arrivants, se faire
connaître, créer des zones
de dialogue entre nous.
Et en faisant ça, donc en se
connaissant, en travaillant
ensemble, d'obtenir plus
d'appuis pour ces communautés
et donc, pour la dualité
linguistique au niveau du pays.
Et c'est ce que nous
faisons depuis 12 ans.
DANIEL LESSARD
Et ça donne des beaux
résultats jusqu'à maintenant?
GUY MATTE
Je pense. Ça donne de beaux
résultats. Prenons des exemples
très concrets: nous étions, cet
été, aux Jeux panaméricains à
Toronto. Alors, nous avons pu
prendre le plus bel endroit de
Toronto qui s'appelle
Dundas Square, qui est le petit
Times Square de Toronto, et on l'a
occupé pendant 14 jours.
130 spectacles qui ont passé
là-dessus. Il y a près de 70 000
personnes qui passent là par
jour, sur cette place, et qui
ont vu une présence francophone.
Des touristes qui venaient des
États-Unis ou des Amériques, ou
les Torontois qui se levaient à
matin et puis: "Qu'est-ce que
c'est? Encore eux? Encore...
Il y a beaucoup de francophones
ici, hein!" C'est toujours un peu--
DANIEL LESSARD
Une invasion.
GUY MATTE
Une invasion!
Alors, on a fait ça aux Jeux
olympiques de Vancouver, c'était
la même chose, on a occupé
un tiers de l'île de Granville
à Vancouver où il y avait...
Ce qui est important, ce qui est
important dans ce que nous
faisons, c'est de mettre les
francophones visiblement
sur la place publique,
qu'on soit vus et qu'on soit
entendus. Alors, c'est pour ça
que nous faisons aussi les
Rendez-vous de la francophonie
à tous les ans.
L'année dernière, plus de 2370
activités qui ont été recensées
à travers le pays, pendant cette
période autour du mois de
mars, autour de la journée
internationale de la
francophonie... Alors, c'est
pour vous dire qu'il y avait
du dynamisme qui était présent
et que ça bouillonnait.
DANIEL LESSARD
Le président de la Fédération
des communautés acadiennes et
francophones que j'ai rencontré
l'an dernier me disait:
"L'une des façons de renforcer
la présence francophone,
c'est de favoriser davantage
l'immigration francophone
hors Québec."
C'est réalisable, ça?
GUY MATTE
C'est réalisable et ça se
fait. Vous avez des groupes. Par
exemple, nous sommes à Ottawa,
il y a un groupe ici qui
s'appelle le CESOC, le
Conseil économique et social
d'Ottawa-Carleton, qui assure
l'arrivée, l'accueil et
l'établissement de centaines
de personnes à chaque année.
Des gens qui viennent beaucoup
d'Afrique ou qui viennent d'Haïti,
ou qui viennent d'Europe,
mais surtout de l'Afrique,
quand je regarde
ce groupe-là en particulier.
Et puis il y en a d'autres,
comme ça, dans la province,
des groupes francophones,
qui assurent l'accueil et
l'établissement. Et c'est
organisé à travers le pays.
Nous avons des réseaux à travers
le pays au niveau de l'accueil
et de l'établissement des
nouveaux arrivants.
Alors, j'imagine qu'on
aura des Syriens là-dedans.
DANIEL LESSARD
M. Matte, pourquoi vous êtes
toujours resté dans l'ombre?
GUY MATTE
Bien, moi, j'aime bien
l'ombre. J'aime bien faire le
travail. Vous savez, c'est plus
intéressant pour moi de faire ce
travail, je dirais pas de sape,
mais ce travail de lobby,
par derrière.
Tu sais, de signaler, de
montrer, développer des
dossiers, de montrer ça... de
les faire avancer, mais pas
seul. On fait pas ça seul.
On est toujours en groupe.
Ça prend toute une gang pour
faire avancer des choses. Moi,
je ne crois pas dans
le pouvoir d'un individu.
Même un premier ministre ne peut
pas faire ça, toutes les choses,
tout seul. Même M. Harper, même
s'il le croyait. Il faut qu'il y
ait beaucoup de monde autour
de lui pour que ça fonctionne et
c'est comme ça que je
vois la realpolitik.
DANIEL LESSARD
Mais vous auriez fait
un maudit bon politicien.
GUY MATTE
Peut-être pas, peut-être que
j'aurais pas eu la patience
d'endurer tout ce qu'un
politicien doit endurer 10
heures, 12 heures par jour.
DANIEL LESSARD
J'imagine que vous
avez été sollicité.
GUY MATTE
On a demandé à quelques
reprises, mais j'ai toujours
refusé, parce que je préférais
faire ce que je faisais
à ce moment-là.
DANIEL LESSARD
Vous avez encore des
projets, M. Matte?
GUY MATTE
Oui, beaucoup de projets! Moi,
ce qui m'excite à l'heure
actuelle, c'est que nous avons,
l'an prochain, en 2017, le 150e
anniversaire de la
Confédération canadienne.
Et je pense que ce sera un temps
formidable pour les francophones
de ce pays de faire la
démonstration de leur présence
depuis ce temps-là, de tout
ce qu'ils ont fait, et puis
qu'est-ce qu'on va faire
dans les prochains 150 ans.
Et nous sommes, à l'heure
actuelle, au niveau de la
fondation, à développer toutes
sortes de projets pour rendre
ça évident au cours de cette
période. Mais je ne vous
en donne pas la
primeur immédiatement.
DANIEL LESSARD
Pas question donc de rester
assis à la maison,
bien tranquille.
GUY MATTE
Jamais de la vie! Je ne
pourrais pas faire ça. Ma mère
qui a 89 ans continue encore
à faire tout ce qu'elle fait. Je
vise pour elle, au minimum, et
j'ai une tante qui est décédée à
106, j'espère me rendre
là. Mais on sait jamais.
DANIEL LESSARD
Merci, M. Matte.
GUY MATTE
Je vous en prie.
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