

La Petite Mosquée dans la prairie
La Petite Mosquée dans la prairie décrit avec humour le quotidien d´une communauté musulmane dans le Saskatchewan.
Vidéo transcription
La petite mosquée
Le révérend Magee, à court d’argent, loue la salle paroissiale de l’église anglicane de Mercy à Yasir Hamoudi, entrepreneur en bâtiment. Le but non avoué de Yasir, représentant de la communauté musulmane, est d’en faire une mosquée ! Le pot aux roses est découvert, bientôt relayé sur la radio locale par Fred Tupper. Entre-temps Baber prononce son dernier sermon car un nouvel imam est attendu à Mercy, et retenu à l’aéroport pour humour explosif… A peine arrivé, il est invité à se justifier sur les ondes auprès de ses fidèles et du révérend, bref, ses débuts sont délicats…
Année de production: 2007
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Devant l'église anglicane de Mercy, un groupe de personnes de confession musulmane arrivent. À la porte, YASIR, un membre de la communauté musulmane, les accueille.
YASIR
Entrez, entrez.
Eh oui,
Salam aleykoum
Allez, on entre.
Salam.
(Accueillant RAYYAN)
Bonjour, mon rayon de soleil.
RAYYAN
Salam.
YASIR
(Accueillant les derniers arrivants)
Salam aleykoum
Allez, on entre, on entre.
BABBER
Alhamdulillah.
On a enfin notre propre mosquée!
Terminé les entassements
dans les caves des maisons
des uns et des autres.
Félicitations, Yasir.
On peut enfin relever la tête.
YASIR
Oui, oui, c'est ça.
Allez, on entre, on entre.
YASIR referme la porte de la salle paroissiale de l'église.
Dans la salle paroissiale, BABBER, le chef spirituel de la communauté musulmane s'adresse à ses ouailles.
BABBER
Étant musulmans,
nous devons avoir conscience
que l'ennemi ne se trouve pas
seulement là dehors,
mais l'ennemi est plus proche
que nous le croyons.
Oui, cet ennemi
est dans votre cuisine.
Plus loin, dans le vestibule, RAYYAN et YASIR commentent le sermon.
RAYYAN
Pendant qu'il y est,
l'ennemi pourrait
faire la vaisselle?
YASIR
Attention, là, il pourrait
ne pas avoir tort.
RAYYAN
Arrête, Baber a toujours tort.
BABBER
Je pense, par exemple...
Baba au rhum...
pêche au vin...
gâteaux apéritifs...
Les pièges de l'Occident conçus
pour pousser les musulmans
à boire de l'alcool!
RAYYAN
Ce sont ses sermons qui vont
pousser à boire de l'alcool!
YASIR
Patience, ma fille.
C'est son dernier sermon.
Le nouvel imam
va arriver très bientôt.
BABBER
On parle de Nouvelle star,
de Star Académie.
Toutes ces stars, ces idoles
doivent être pulvérisées!
Desperate Housewives...
Pourquoi devraient-elles
être désespérées,
alors qu'elles ne font
qu'accomplir
leur devoir de femme,
c'est tout?
SARAH, l'épouse de YASIR, convertie à l'Islam assiste aussi au sermon de BABBER. RAYYAN s'assoit près de SARAH, sa mère, pour écouter.
RAYYAN
(S'adressant à ANN)
Tu as enregistré l'épisode
qui est passé hier?
SARAH
Il était génial!
YASIR
(Se tournant vers SARAH)
Chut!
Un habitant de la ville de Mercy, JOE, arrive à la salle paroissiale et fait le tour de l'endroit. Il aperçoit le groupe en prière. [BABBER
Allah!
Allah!
JOE, effrayé par le groupe en prière, court à l'extérieur en trébuchant dans des chaises près de la porte. Le vacarme alerte SARAH.
JOE
Pardon, je croyais
que c'était...
Je suis pas au bon endroit!
JOE sort en courant. YASIR part à sa rencontre.
YASIR
Continuez, continuez. Hé!
JOE sort de l'église et prend son téléphone.
JOE
C'est le numéro d'urgence
pour les attaques terroristes?
Vous me dites de patienter?!
Titre :
La petite mosquée dans la prairie
Générique d'ouverture
AMAAR parle au téléphone pendant qu'il fait la file pour enregistrer ses bagages à l'aéroport.
AMAAR
Maman, arrête de culpabiliser.
Non, ne me passe pas papa.
J'ai planifié tout ça
depuis des mois.
C'est pas comme si une bombe
lui explosait à la figure.
La femme devant AMAAR dans la file, entend le mot bombe et tend l'oreille.
AMAAR
Eh bien, si papa trouve que
c'est du suicide, tant pis.
C'est Allah qui l'aura
voulu pour moi.
VOYAGEUSE
(Quittant la file)
Oh, mon Dieu...
AMAAR
Je me mets pas fin à ma vie,
je vais juste m'installer
dans la prairie
pour diriger une mosquée.
Un POLICIER agrippe le poignet d'AMAAR au moment où il s'apprête à enregistrer ses bagages.
AMAAR
Mais...
POLICIER
Éloignez-vous de vos bagages.
Vous n'irez pas
au paradis aujourd'hui.
AMAAR
Excusez-moi,
mais qu'est-ce qui se passe?
Un autre policier saisit les bagages pendant que l'autre fait sortir AMAAR de l'aéroport.
AMAAR
Il doit y avoir
un malentendu. Mes bagages!
Pendant ce temps, dans la petite ville, JOE s'adresse au révérend MCGEE pour raconter son histoire.
JOE
Je les ai vus se courber
et marmonner comme à la télé.
RÉVÉREND MCGEE
Ils sont musulmans,
ils prient cinq fois par jour.
JOE
Vous louez
la salle paroissiale
à une bande de fanatiques?
Le RÉVÉREND MCGEE monte dans sa voiture, pas troublé le moins du monde.
RÉVÉREND MCGEE
Ne soyez pas paranoïaque.
Beaucoup d'églises louent
des espaces à des entreprises.
C'est simplement
un projet pilote.
JOE
Pilote?
Ils forment des pilotes?!
RÉVÉREND MCGEE
Mais voyons, il y a rien
de sinistre dans l'entreprise
de construction
de Yasir, calmez-vous.
JOE
Oussama ben Laden avait
une entreprise
de construction, lui aussi.
Le RÉVÉREND MCGEE s'éloigne en voiture, pendant que JOE rebrousse chemin.
FATIMA et SARAH discutent dans le bureau de YASIR, contigu à la salle paroissiale.
FATIMA
Je refuse de manger
des concombres
dans un sandwich
pendant le ramadan!
SARAH
Et moi, je ne me remplirai pas
l'estomac avec n'importe quoi
après avoir jeûné toute la journée.
FATIMA
Le mouton, c'est une tradition.
SARAH
Le mouton, c'est une espèce
de bouffe tout ambulant.
FATIMA
Tout comme ton mari.
YASIR rejoint SARAH et FATIMA.
SARAH
Tu aimes les concombres,
n'est-ce pas, chéri?
YASIR
J'aime tous les plats
que me fait ma femme.
SARAH
Yasir, tu peux expliquer,
s'il te plaît, à Fatima
que le four n'est pas assez grand
pour y faire cuire
un mouton entier?
JOE se faufile dans la salle pendant que SARAH et FATIMA s'obstinent.
FATIMA
Et toi, est-ce que
tu peux dire à ta femme
que je n'ai pas besoin de four.
Je vais le faire rôtir
dans un trou devant.
YASIR
Devant... Devant chez nous?
Ah non, non, non.
Non, non, non, on ne rompra
le jeûne devant chez nous.
FATIMA
Pourquoi?
YASIR
Il y a bien trop de monde.
On aura jamais de permis.
Pas de mouton.
SARAH
Mais Yasir,
tu adores le mouton.
YASIR
Non, on rompra le jeûne
dans la cave comme d'habitude.
SARAH
Quel est l'intérêt d'avoir
une nouvelle mosquée alors?
YASIR
C'est juste le ramadan.
Pourquoi vous en faites
tout un plat comme ça?
BABBER entre dans le bureau de la salle paroissiale en tenant une enseigne sur laquelle on peut lire : Mercy Mosque.
BABBER
Yasir, qu'est-ce
que tu en penses?
Ça en jette, hein?
YASIR
Pourquoi mettre un écriteau?
Tout le monde sait déjà
que c'est une mosquée...
YASIR se retourne et aperçoit JOE derrière la fenêtre du bureau.
SARAH
C'est magnifique.
YASIR
Attention,
il faut qu'on sorte.
Allez, s'il vous plaît,
tout le monde, j'ai un client.
Tsk, tsk, tsk!
YASIR fait sortir les autres pour accueillir JOE.
YASIR
S'il vous plaît!
Bonjour!
YASIR
(S'adressant à JOE)
Bonjour, c'est gentil
d'être revenu.
Qu'est-ce que
je peux faire pour vous?
JOE
Mes tuiles... Mon toit.
YASIR
Si vous voulez passer
dans mon bureau.
JOE
Alors, qu'est-ce qu'il se
passait, là, tout à l'heure?
YASIR
Ça? Ha! Une petite
prière impromptue
pour que les affaires
démarrent bien.
BABBER
Yasir.
J'ai une idée qui te plaira.
On peut utiliser la buanderie
pour laver et préparer
les cadavres.
JOE prend un air effrayé en entendant parler de cadavres et s'enfuit à toute jambe.
Pendant ce temps, dans le bureau de police de l'aéroport, AMAAR est interrogé.
AMAAR
Quelle est l'accusation?
Voyager en étant musulman?
POLICIER
Non, c'est pas l'accusation.
AMAAR
Je plaisantais.
Les musulmans,
dans le monde entier,
sont réputés
pour leur sens de l'humour.
POLICIER
Je le savais pas, ça.
AMAAR
C'est encore une plaisanterie.
AMAAR fait un geste de la main au-dessus de sa tête.
POLICIER
Holà!
C'est quoi, ça?
Une espèce de signal?
AMAAR
Non, c'est parce que
vous avez pas saisi.
POLICIER
Vous avez vécu
plus d'un an en Afghanistan.
AMAAR
Je travaillais bénévolement
pour une agence de développement.
POLICIER
Pourquoi avoir quitté le
cabinet d'avocats de votre père?
AMAAR
Pendant que j'étais en Égypte
pour mes études islamiques,
j'ai découvert ma vraie vocation.
POLICIER
Les explosifs?
AMAAR
Oui, les explosifs.
Le POLICIER s'apprête à écrire dans son rapport.
AMAAR
Mais non, voyons!
Je vais dans la ville de Mercy
pour travailler comme imam.
Comme un prêtre.
(Voulant chercher dans son porte-monnaie)
Je peux le prouver.
POLICIER
(Interrompant le geste)
Oh, hé!
AMAAR
(Levant les mains)
J'ai l'annonce à laquelle
j'ai répondu pour le job.
Appelez la mosquée,
si vous voulez.
Si mon histoire ne colle pas,
vous me déporterez en Syrie.
POLICIER
Hé, c'est pas à vous de choisir
dans quel pays
nous vous déporterons.
AMAAR
C'était...
Appelez, s'il vous plaît.
POLICIER
Très bien, M. Rachid,
je vais vous accorder
le bénéfice du doute.
Si votre histoire est confirmée,
vous êtes un tout petit peu
plus près de la sortie.
Sur la porte du bureau de YASIR, on lit : Yasir Hamoudi, entrepreneur. Le téléphone sonne dans le bureau. Le répondeur s'enclenche.
YASIR
(Voix sur le répondeur)
Bonjour, vous êtes bien
au nouveau siège social
de l'entreprise
de construction Hamoudi.
Nous pulvérisons la concurrence.
POLICIER
Eh bien, revenons
à votre passage en Afghanistan.
À la radio locale de la ville de Mercy, FRED TUPPER anime une émission.
FRED
Ici Fred Tupper
et vous écoutez
Réveille-toi bon peuple.
(Faisant une entrevue avec JOE)
Alors, Joe,
le révérend McGee affirme
qu'il a loué
la salle paroissiale
à une entreprise du bâtiment?
JOE
C'est ce qu'il affirme.
FRED
Mais vous avez
une autre version.
JOE
Je suis pas un expert, Fred,
mais quand on entre
dans une pièce
et qu'on voit un mollah barbu
qui parle de pulvériser
la Nouvelle Star, on se doute
que c'est pas un maçon.
Je veux dire, c'est quoi le
problème avec la
Nouvelle Star?
Au restaurant de FATIMA, la radio joue et l'entrevue de JOE est diffusée en direct.
FRED
(Parlant à la radio)
Non, ce n'est pas la
Nouvelle Star
qu'ils détestent,
non, non, non,
c'est la liberté...
Et la Nouvelle Star.
JOE
(Parlant à la radio)
Je voulais juste
refaire mon enseigne
comme n'importe quel Canadien
normal qui travaille dur.
FATIMA
(Entendant les propos de JOE)
Yasir!
De son côté le RÉVÉREND MCGEE entend aussi les propos de JOE et FRED en écoutant la radio dans son église.
FRED
Une entreprise du bâtiment
construit des trucs, Joe.
Ces gens-là les détruisent.
JOE
Et j'ai aussi entendu
ces gens-là parler
de laver des cadavres
dans la buanderie.
FRED
Oh, mais il y a
pire encore, Joe.
Partout en ville, les gens écoutent l'émission de FRED. SARAH entend l'émission à la mairie, où elle travaille.
FRED
Apparemment, la cheville
ouvrière musulmane,
la femme de Yasir Hamoudi,
Sarah, travaille comme relation
publique pour le maire.
Leurs tentacules sont partout.
Réveille-toi, bon peuple.
SARAH entre dans le bureau de la mairesse, ANN POPOVICZ, remet un document et se dirige vers la sortie.
ANN
Sarah, vous êtes censée répandre
les nouvelles et pas les faire.
SARAH
Ça, c'est la patte de Yasir.
Je suis certaine
qu'il mijote quelque chose.
ANN
Appelez la police. On va
vous placer sous protection.
SARAH
Ann!
Yasir n'est pas un terroriste.
ANN
Oh, bien sûr que non!
SARAH
J'arrive pas à croire
que vous ayez pu le penser.
C'est vrai, Yasir a voté
républicain la dernière fois.
ANN
Vous avez raison,
c'est ridicule.
SARAH
Merci.
ANN
Ou il a bien travaillé
sa couverture...
Ah, je plaisante, voyons!
Néanmoins, il vaudrait mieux
aller voir ce qui se passe.
SARAH
Je vais lui soutirer
la vérité vite fait.
ANN
Je peux m'accommoder
de la vérité.
Mais seulement
SARAH ET ANN
En dernier recours.
SARAH
Ah!
Plus tard, YASIR et SARAH discutent chez eux. RAYYAN rejoint ses parents dans la cuisine.
SARAH
Je n'en reviens pas
que tu aies menti
au révérend McGee et à moi!
YASIR
Chérie...
SARAH
Bonjour, ma puce.
RAYYAN
Bonjour.
YASIR
Bonjour, ma belle.
Chérie, je suis entrepreneur, et
un entrepreneur, ça ne ment pas.
SARAH
Je ne comprends pas pourquoi
tu n'as pas juste
parlé de la mosquée.
YASIR
Oui, ça, c'est une bonne question.
Révérend, je voudrais installer
une mosquée
dans votre salle paroissiale.
Vous en parlez à Jésus
ou je m'en charge?
SARAH
Résultat, tu as rien dit.
Ça, c'est génial.
YASIR
Parfait, j'ai cru que
tu serais un peu... en colère.
Écoutez, mesdames,
merveilleuses femmes,
j'ai appelé une centaine
d'endroits.
Personne ne voulait louer
à une mosquée.
RAYYAN
Il n'y a pas une centaine
d'endroits possibles ici.
SARAH
Combien de fois faut-il te dire
que les mensonges ne marchent
que s'ils sont à moitié vrais.
YASIR
Quel chiffre marcherait
pour toi, chérie? 50?
SARAH
Non.
YASIR
30?
SARAH
Non.
YASIR
Alors, 22.
SARAH
Hum...
YASIR
Oui, 22, ça, c'est bien.
RAYYAN
Je suis adoptée.
Par pitié, dites-moi
que je suis adoptée.
SARAH
Je n'arrive pas à croire
que tu aies entraîné toute
la ville dans cette histoire,
le maire compris.
RAYYAN
Et qu'est-ce que le nouvel
imam va penser de tout ça?
YASIR
Oh, le nouvel imam! Je devais
passer le prendre à la mosquée.
RAYYAN
Papa! Tu as appelé une centaine
d'imams avant de le trouver?
YASIR
Vous allez l'adorer
toutes les deux.
Je vous assure, un type honnête,
droit et ex-avocat.
RAYYAN
Génial.
AMAAR descend d'un taxi. Un journaliste se rue pour le prendre en photo et le questionner.
AMAAR
(Surpris de la présence du photographe)
Mais enfin!
JOURNALISTE
Quel votre rapport
avec la mosquée?
AMAAR
Laissez-moi d'abord payer.
JOURNALISTE
Je voudrais vous poser
deux ou trois questions.
Quel est votre commentaire
sur le scandale?
AMAAR
Quel scandale?
JOURNALISTE
Qu'avez-vous à dire sur
les accusations de terrorisme?
AMAAR
Écoutez, la police
n'a aucune preuve contre moi.
JOURNALISTE
Quoi, la police?
Qui êtes-vous?
AMAAR
Je suis Amaar Rashid,
le nouvel imam.
C'est comme un prêtre ou
un rabbin, juste en plus foncé.
YASIR, SARAH et RAYYAN rejoignent AMAAR.
JOURNALISTE
Alors, vous niez
être un terroriste?
AMAAR
Quoi? Quoi?
SARAH
(S'adressant à YASIR)
Tu as engagé un terroriste?
YASIR
Non, je n'ai pas engagé de terroriste.
SARAH
(S'adressant à RAYYAN)
Il est beau gosse.
RAYYAN
Un beau terroriste,
c'est antinomique.
AMAAR
(S'adressant à Yasir)
Qui êtes-vous?
Où est Yasir?
YASIR
Salam aleykoum
Je suis Yasir Hamoudi.
Je vous présente ma femme Sarah
et ma merveilleuse fille, Rayyan.
SARAH
Elle c'est Rayyan.
YASIR
Bienvenue. Bienvenue à notre
petite mosquée dans la prairie.
AMAAR
Yasir, il faut qu'on se parle.
Le message sur votre répondeur.
Vous parlez de pulvériser les gens.
YASIR
Oui.
SARAH
Oh, je sais.
Le journaliste qui assiste à la rencontre note tout dans son carnet.
SARAH
Je lui ai dit la même chose.
Il faut que tu le changes.
JOURNALISTE
Vous pulvérisez les gens?
Vous êtes une cellule dormante?
AMAAR
Répondez pas à ça.
JOURNALISTE
Quel est votre lien avec Al-Qaïda?
RAYYAN
Quel est votre lien
avec le journalisme?
YASIR
Ça, c'est une bonne question.
SARAH
Bon. Le spectacle est terminé.
On y va!
JOURNALISTE
(S'adressant à AMAAR)
Vous venez d'Arabie saoudite?
AMAAR
Non, je viens de Toronto.
JOURNALISTE
Toronto? Encore mieux.
Cette histoire est énorme!
YASIR
D'accord. C'est ça. On y va.
SARAH
Pas la peine de continuer.
On a des choses à faire.
La famille de YASIR attire AMAAR plus loin, pendant que le journaliste prend des photos.
SARAH
On peut pas rester
plus longtemps.
(Posant pour le journaliste)
J'avais les yeux fermés.
D'accord.
On recommence. Merci bien.
YASIR
(Approchant de son véhicule)
Mettez les bagages à l'arrière.
Sarah, s'il te plaît.
SARAH
Quoi? J'étais polie.
Le lendemain, AMAAR fait la une du journal local. AMAAR prend un repas au restaurant de FATIMA.
AMAAR
C'est horrible.
FATIMA
Vous l'avez même pas goûté.
AMAAR
Non, non.
Pas votre plat, ça.
(Montrant la une du journal)
Comment je peux préparer
le ramadan quand toute la ville
est en ébullition?
Comment avez-vous pu faire ça?
FATIMA
Ça, c'est la faute
de Sarah, la convertie.
Sincèrement,
est-ce que le mouton,
c'est pas plus traditionnel
que les concombres?
AMAAR
Je n'ai pas tout compris.
FATIMA
Je croyais que vous deviez
être un super grand imam.
Vous n'avez pas l'air d'un imam.
Vous avez l'air d'un gosse.
AMAAR
Je peux avoir
un cappuccino light?
FATIMA
On ne fait pas
ce genre de cappuccino.
AMAAR
D'accord, un normal alors.
FATIMA
On ne fait pas de normal.
AMAAR
Vous ne faites pas
de cappuccino?
FATIMA prend met une grosse boule de crème fouettée dans le café de AMAAR.
FATIMA
Le voilà, votre cappuccino.
AMAAR
Mais qu'est-ce que
je fais ici?
L'émission de FRED commence à la radio.
FRED
(Parlant à la radio)
Qui est ce Amaar Rashid?
Et que fait-il
vraiment chez nous?
Ici Fred Tupper...
FATIMA
La voilà peut-être,
votre réponse.
FRED
(Parlant à la radio)
Réveille-toi, bon peuple.
De son bureau, YASIR essaie de calmer les autres.
YASIR
Tout finira par se calmer.
Je vous le promets.
BABBER
Tu veux juste t'adapter
à la culture occidentale.
C'est pour ça que tu as
loué une église, hein?
C'est pour nous transformer
en chrétiens!
YASIR
Toi, tu es fâché
parce que tu ne peux plus
jouer les imams maintenant.
BABBER
Tu trouves que je suis
trop orthodoxe?
Que je fais peur aux Blancs?
Mais qui nous a décroché
la une des journaux?
Tout simplement
M. Yasir le profane
et sa gravure de mode
de Toronto, l'imam.
S'il avait le cran
de se montrer par ici, je...
AMAAR
(Arrivant près de BABBER)
Hum-hum!
Salam aleykoum
BABBER
Aleykoum salam.
YASIR
Tu disais?
BABBER
Je disais que tout ça,
c'est absurde.
L'église va nous virer
d'un jour à l'autre.
AMAAR
Laissez-moi
jeter un oeil au bail.
J'étais avocat à une époque.
On sait jamais,
je peux peut-être
retrouver une faille.
En attendant, notre problème
est une question d'optique.
BABBER
Un avocat et un ophtalmo,
on est bien partis.
AMAAR
Croyez-moi, je vais régler ça.
Plus tard, à la radio locale, FRED interroge AMAAR.
FRED
Êtes-vous un terroriste?
AMAAR
Non, je suis--
FRED
Vous refusez ce terme?
AMAAR
Oui, bien entendu.
FRED
Vous préférez moudjahidin?
AMAAR
Oui. Non.
Enfin, écoutez, Fred.
Je suis venu ici
pour dissiper un malentendu.
Vous ne me laissez
pas parler.
FRED
Allez. Vous êtes libre de
dire tout ce que vous voulez.
C'est le privilège de vivre
dans un pays de liberté.
AMAAR
Liberté? De faire quoi?
Attiser les flammes de la haine?
FRED
Hé, ce ne sont pas les
prêcheurs musulmans comme vous
qui font ça? J'ai des nouvelles
pour vous, Johnny Jihad.
AMAAR
Ça, c'est--
FRED
Ici, on se croise pas les bras
en attendant que ça se passe.
Vous pouvez parier vos falafels.
Le révérend écoute l'émission de radio de FRED chez lui.
FRED
(Parlant à la radio)
J'en appelle au révérend McGee
afin qu'il chasse votre bande
de la salle paroissiale
avant le coucher du soleil.
Le RÉVÉREND MCGEE compose un numéro sur son téléphone.
RÉVÉREND MCGEE
Euh, Yasir, ici
le révérend McGee à nouveau.
il faut qu'on parle
du bail assez vite.
AMAAR est toujours à la radio locale.
AMAAR
Le coucher du soleil?
On est où là, dans un western?
FRED
Ah, vous avez tout pigé,
mon petit Bédouin Cowboy.
AMAAR
D'accord.
FRED
Vous n'êtes plus
dans la grande ville.
FATIMA écoute la radio dans son restaurant.
AMAAR
(Parlant à la radio)
J'avais remarqué.
Personne dans cette ville
ne sait faire un cappuccino.
FRED
(Parlant à la radio)
Dites carrément
que nous sommes
des ignares.
AMAAR
Certains d'entre vous, oui.
En fait, je n'ai jamais vu
une petite ville
aussi ignare de ma vie.
CLIENT DU RESTAURANT
S'il déteste tellement cette
ville, il n'a qu'à retourner
à Toronto.
Plus tard AMAAR range ses affaires dans un carton en parlant au téléphone.
AMAAR
Oui, un aller simple
pour Toronto.
Amaar Rashid.
Oui. J'attends.
RAYYAN rend visite à AMAAR.
AMAAR
(S'adressant à RAYYAN)
Un musulman ne peut plus prendre
un aller simple en avion
sans que quelqu'un en réfère
à son superviseur?
RAYYAN
Ah, mon pauvre.
C'est votre profil racial.
Ça complique terriblement
les choses pour que vous puissiez
vous faire la malle.
AMAAR
Qu'est-ce que je peux faire?
RAYYAN
Je ne sais pas.
Laissez-moi demander à l'imam.
Oh, pas de chance,
il vient de se sauver.
AMAAR
Écoutez, j'ai fait
une belle bourde, d'accord?
RAYYAN
Non, ce n'est pas d'accord.
Vous étiez censé être...
En fait, vous êtes
l'homme dont je rêvais.
AMAAR
Rayyan, je suis pas sûr
que ce soit convenable.
RAYYAN
Calmez vos ardeurs.
J'ai rêvé de vous
pour notre mosquée.
Vous comprenez, je voyais
un imam progressiste,
né au Canada.
Je pensais que
vous nous entraîneriez
vers le monde moderne.
Au moins au XIe siècle.
AMAAR
Moi aussi. C'est pour ça
que j'ai arrêté d'être avocat.
RAYYAN
Ah... Je pensais
que vous étiez nul aussi à ça.
AMAAR
Hum-hum...
RAYYAN
Vous ne pouvez pas partir.
Pas quand votre congrégation
est là à l'intérieur maintenant
en train de s'écharper pour savoir
quand commencer le ramadan.
AMAAR
Je vais louper ça, désolé.
Quand j'étais gamin,
mes parents ne jeûnaient jamais.
Ils sont très gros.
(Écoutant au téléphone)
Ah! Mais ils ont raccroché.
RAYYAN
Vous voyez?
(Raccrochant le combiné)
C'est un signe.
Entrez là-dedans
et soyez l'imam.
AMAAR
D'accord.
RAYYAN
Merci!
Les membres de la communauté musulmane sont réunis dans la salle paroissiale. AMAAR a un télescope placé devant lui.
BABBER
(S'adressant à AMAAR)
Le croissant de la nouvelle
Lune devrait être observé
de nos propres yeux.
C'est ce que le prophète a dit.
RAYYAN
Je ne crois pas que
le prophète ait eu un télescope
pour observer la Lune.
On est d'accord?
YASIR
Écoutez, nous faisons ça
tous les ans.
Cela dit, je ne suis pas
un expert-
BABBER
Ce que nous constatons
tous les ans.
YASIR
Hum. Mais on pourrait
peut-être se connecter
sur observationdelalune.com
et la famine pourra commencer.
SARAH
Pourquoi on fait pas
comme les chrétiens?
On prend un mois
et on s'y tient.
Qu'est-ce que vous reprochez
à décembre?
Les jours sont plus courts
pour jeûner et c'est bien
plus agréable pour le shopping.
RAYYAN
Malheureusement
pour toi, maman,
l'islam n'est pas basé
sur le cycle du shopping.
FATIMA
Traditionnellement,
le ramadan commence
quand la nouvelle Lune
monte dans le ciel d'Arabie.
BABBER
Les Saoudiens
ne trouveraient la Lune
que si elle débordait
de pétrole.
FATIMA
Alors, il faut
téléphoner en Arabie.
YASIR
Non, non, non.
Personne n'appelle là
sur mon téléphone.
BABBER
Il faut un oeil humain.
FATIMA
En Arabie!
AMAAR
Je peux intervenir,
s'il vous plaît?
Après tout, c'est moi
l'imam que je sache.
RAYYAN
D'accord, frère Amaar.
Qu'est-ce qu'on fait?
AMAAR
Eh bien, à Toronto... Oubliez.
FATIMA
Non, non, non.
Dites-nous donc
ce qu'ils font à Toronto.
BABBER
Est-ce que le ramadan
commence à la minute
où sonne la cloche de la Bourse?
AMAAR
Vous savez quoi?
On oublie Toronto.
On est à Mercy
et dans cette mosquée,
c'est moi qui décide
quand commence le ramadan.
Babber, il est temps de me passer
le télescope.
AMAAR prend le télescope pour le transporter à l'extérieur.
YASIR
Je vous donne un coup de main.
AMAAR
Merci.
BABBER
Alors, on marche
avec le télescope.
J'ai gagné!
RAYYAN
(Soupirant)
Tu es trop bête.
AMAAR et YASIR sont maintenant sur une toiture avec le télescope. Il fait encore jour.
AMAAR
Pour l'amour de Dieu,
est-ce que le Soleil se couche
par ici? On attend depuis 8h30.
YASIR
Vous êtes au milieu
de la prairie.
Ça va prendre un certain temps.
AMAAR
(Soupirant)
Ça aurait pu
être une si jolie mosquée.
YASIR
On s'est beaucoup trop battus.
On ne peut pas abandonner.
Vous devez trouver une faille.
Dans l'oeil du télescope, YASIR voit le RÉVÉREND MCGEE approcher.
YASIR
(Se tournant vers AMAAR)
Attention! Le révérend vient
par ici. Vous devez faire
quelque chose.
AMAAR
Quoi?
YASIR s'étend sur une partie du toit en pente.
YASIR
Faites-lui un procès.
AMAAR
Désolé.
On peut pas faire un procès
à quelqu'un sans raison.
Bon, d'accord, on peut, mais
je n'en fais plus maintenant.
YASIR
Je ne peux pas
perdre mon bureau.
Ou la mosquée.
AMAAR va à la rencontre du RÉVÉREND MCGEE.
AMAAR
Révérend McGee.
RÉVÉREND MCGEE
Je vous ai écouté
à la radio avant-hier.
À vous entendre,
vous êtes un bel abruti.
AMAAR
Merci.
RÉVÉREND MCGEE
(Tendant une enveloppe)
Oh... Je voulais
donner ça à Yasir.
AMAAR
Je sais que Yasir n'a pas
fait honneur à la communauté--
RÉVÉREND MCGEE
Non, mais--
AMAAR
S'il vous plaît,
attendez. Laissez-moi finir.
J'espérais que vous
nous laisseriez rester,
parce que les haines religieuses
et raciales vont
détruire le monde
si les hommes de foi,
des hommes comme nous-
RÉVÉREND MCGEE
Amaar...
Avec tout mon respect,
vous la fermez.
Je ne vous expulse pas.
C'est un nouveau bail
qui reflète la vraie nature
de... de vos multiples...
activités.
Mais si vous avez envie
d'ouvrir un bowling aussi,
appelez-moi avant.
AMAAR
Merci. Mais pourquoi?
RÉVÉREND MCGEE
Quand Fred Tupper
me demande de faire une chose,
je fais souvent l'opposé.
AMAAR
Il n'y a pas eu de soucis
avec votre congrégation?
RÉVÉREND MCGEE
Venez écouter
mon sermon dimanche.
Je suis heureux quand je remplis
les deux premiers rangs.
C'est peut-être Dieu qui a dit:
« que la lumière soit »,
mais c'est moi
qui paie la facture.
AMAAR
Bien. Merci.
Les deux hommes se serrent la main. Plus tard, AMAAR anime sa première séance de prière.
AMAAR
En ce neuvième mois
du calendrier musulman,
nous sommes priés de nous
examiner d'un oeil critique.
Et si on ne peut pas le faire,
d'autres le feront pour nous.
Je ne suis peut-être pas
le meilleur imam du monde,
mais j'ai aussi beaucoup appris
sur l'humilité cette semaine.
Et j'en ai fait un usage
assez remarquable,
si je peux me permettre.
Après la prière, la communauté musulmane de Mercy se réunit pour manger.
RAYYAN
Je prends toujours du poids
pendant le ramadan.
Je meurs de faim.
SARAH
Les sandwiches
au concombre sont prêts.
Dégagez pour
les sandwiches!
La mairesse Ann arrive à la fête.
ANN
Bonjour, Sarah.
SARAH
Bonjour, Ann. Vous voulez
un petit sandwich?
ANN
Euh, je me disais
que un repas pour le ramadan
serait plus... exotique.
FATIMA
Le mouton au curry est prêt.
Excusez-moi.
ANN
Oh, mais ça sent
merveilleusement bon!
FATIMA
C'est la tradition.
Et la tradition sent
toujours bien meilleur.
ANN se penche au-dessus de la marmite pour humer le fumet.
YASIR
(S'approchant d'ANN)
Hum-hum. madame le maire.
Je voudrais vous présenter
notre nouvel imam, Amaar.
AMAAR
Madame le maire.
ANN
Enchantée. Mes premiers jours
à mon poste n'ont pas été
une partie de plaisir non plus.
Fred Tupper, en parlant de moi,
disait « la belle-maire ».
YASIR
(Éclatant de rire)
« Belle-maire! »
AMAAR
Ça vous tente?
YASIR
(Tentant de se reprendre)
Du mouton?
ANN
Merci.
Le RÉVÉREND MCGEE assiste aussi à la fête. Il s'approche de SARAH.
RÉVÉREND MCGEE
Ça va?
Vous savez...
quand je vous imaginais
revenir dans l'église,
ce n'est pas exactement
ce que j'avais à l'esprit.
SARAH
Mais mon révérend,
on peut pas toujours gagner.
RÉVÉREND MCGEE
Si jamais vous changez d'avis,
faites-le-moi savoir.
Parce que j'aime beaucoup
ces petits sandwiches.
SARAH
Oh! Ça me fait bien plaisir.
J'en ai des centaines.
AMAAR
(S'adressant à YASIR)
J'espère que vous avez appris
que l'honnêteté est
la meilleure politique.
YASIR
Ah, bien sûr.
D'ailleurs, ça me ramène
à votre salaire.
AMAAR
Je suis plutôt flexible.
YASIR
On n'a pas de quoi
bien vous payer.
AMAAR
Vous avez combien?
YASIR
On n'a plus rien.
AMAAR
Je ne suis pas aussi flexible.
YASIR
Bon, si vous préférez quitter,
je pense qu'ils arriveront
à comprendre.
Mais il me semble
que vous êtes attaché
à notre petite communauté.
AMAAR
Pourquoi vous ne m'avez pas
dit avant mon départ de Toronto
que vous n'aviez pas de quoi
me payer?
YASIR
Mais maintenant,
je suis honnête avec vous.
AMAAR
Yasir, vous devez apprendre
la différence entre l'honnêteté
et le chantage affectif.
YASIR
Et qui mieux que vous
peut me l'apprendre,
frère Amaar?
Qui mieux que vous?
Générique de fermeture