Voyage à travers les couleurs
Jaune, rouge, bleu, vert... Les couleurs sont souvent ce qui nous frappe quand nous découvrons un pays. Pourquoi le jaune et l'or sont-ils autant utilisés dans la décoration des temples ? Comment le pigment bleu qui colore les étoffes est-il produit ? Notre oeil est d'abord attiré par des teintes vives ou inhabituelles : celles d'une rivière ou une fleur rare, de costumes traditionnels ou d'un accessoire banal. Et pourquoi pas explorer un pays à travers ce prisme?


Vidéo transcription
La Chine en bleu
Dans la nature chinoise, comme dans son artisanat, les nuances de bleu, parfois insolites, exercent une attraction très forte. D’un bleu profond, suspendu à 3000 mètres d’altitude, le lac Quinghai attire l’oeil dans l’ouest de la Chine. Rencontre avec les nomades qui peuplent ses rives. Monsieur Zhong De, Artiste peintre, aime s’essayer à toutes les nuances et teintes que permet le bleu. Bleu gris, bleu de Chine, bleu vert… Cette teinte évoque selon lui l’infini.
Dans les ateliers de porcelaine de Pékin une teinte de bleu marque l’identité de la Chine. Ces délicats objets, décorés de glaçures bleues et blanches ont depuis longtemps influencé l’artisanat du monde entier.
Tai O est le village des Tankas, communauté de pêcheurs qui construisent depuis des générations leurs maisons sur pilotis au-dessus des vasières de Hong-Kong. Nantong est le lieu de naissance de l’industrie textile en Chine. A cet effet, un style indémodable y est célébré au sein du musée du calicot. Cette technique ancestrale à base de teinture bleu indigo y est encore pratiquée manuellement.
Année de production: 2016
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Une succession de scènes vivantes ou de paysages défilent en ouverture de l’émission pour illustrer le propos de la narratrice.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Les couleurs,
voilà ce qui nous frappe
d'emblée lorsqu'on
découvre la Chine.
Notre oeil est d'abord attiré
par les teintes vives aux plus
subtiles. La couleur d'un
fleuve, l'éclat d'une fleur,
d'une sculpture, d'un monument,
d'un costume traditionnel
ou d'un objet précieux.
Alors, pourquoi ne pas explorer
la Chine à travers le filtre
d'une couleur?
Différentes scènes évoquant la couleur bleue défilent rapidement.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Dans la culture chinoise,
le bleu est depuis des siècles
le symbole du ciel,
mais aussi de la pureté
et de la fraîcheur. Partons
à la découverte de la Chine
à travers la couleur bleue.
Générique d’ouverture
Titre :
Voyage à travers les couleurs
Titre :
La Chine en bleu
Les pics enneigés du massif montagneux du Kunlun apparaissent sur un fond de ciel bleu parsemé de nuages.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Au nord-ouest de la Chine
s'étend à 3200 mètres d'altitude
le haut plateau tibétain
bordé par le massif
montagneux du Kunlun.
Dans une ville, les habitants circulent à pied ou avec de petits véhicules. Ce sont des moines, des Tibétains portant leurs costumes traditionnels ou d’autres personnes issues de la culture tibétaine.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Ici, dans cette province
autonome du Qinghai vit
une population multiethnique
dont un tiers est tibétaine.
Un homme affiche un large sourire orné de deux dents en or. Puis une femme pose avec ses deux jeunes enfants. Une voiture circule sur une route bordée de banderoles de différentes couleurs.
Une carte de la Chine apparaît. Un point rouge marque la ville de Pékin et un autre point au centre de la carte situe le Lac Ginghai.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Sur ce haut plateau plus étendu
que la France, le bleu du ciel
se reflète dans le plus grand
lac salé de Chine:
le lac Ginghai, aussi
appelé la mer bleue.
Tel un miroir, le lac réfléchit le décor avec perfection impressionnante. Deux hommes chevauchent les rives du lac au grand galop.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Le lac Quinghai s'étend sur 5 000
kilomètres carrés. Il prend
sa source dans 23 rivières.
Plus d'une centaine
s'y déversaient il y a 50 ans.
Les cavaliers se reposent après leur chevauchée.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Aux yeux des Mongols et
des Tibétains, c'est un lac
sacré qu'ils appellent
Kokonor, «le lac bleu».
Des bêtes paissent dans les pâturages qui bordent les rives du lac. Des yacks et des moutons se côtoient dans ces pâturages.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Ce lac est entouré de terres
cultivées et de pâturages
exploités par les nomades
tibétains, empreints
de la culture bouddhiste.
Un homme parcourt le territoire pour ramener les bêtes égarées au troupeau sur une motocyclette.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Ils vivent en harmonie
avec la nature au milieu
de leurs troupeaux.
Un garçon sourit et semble heureux parmi les bêtes.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Zengate et sa famille
s'installent sur les rives
de Kokonor au printemps
pour faire paître leurs
troupeaux de yacks et de moutons.
Ils font partie de l'ethnie
des Changpas, que les Chinois
considèrent comme des Tibétains.
Une yourte rudimentaire est dressée au milieu des champs. ZENGATE et sa famille y vivent. La femme s’approche d’une bête et la trait au milieu du pâturage.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
C'est comme ça
qu'on trait les bêtes. Ensuite,
on utilise le lait pour faire du
thé. Le thé fait avec le lait de
la femelle du yack est délicieux.
La BERGÈRE doit retirer un veau de sa mère avant de la traire.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Maintenant, je vais
en traire une autre.
J'ai terminé la traite.
Maintenant, je vais
faire du thé.
Dans la yourte,la BERGÈRE verse le lait de yack dans une casserole qui contient déjà du thé. Puis, elle alimente le poêle en combustible.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
On ajoute le lait là-dedans et
on mélange. Quand on le boira,
on va se régaler.
Ce que je mets dans le poêle,
c'est du crottin de moutons.
Ça brûle bien. Ça réchauffe
toute la yourte.
Avec ce feu, le thé va bouillir.
Une ondée tombe sur les pâturages. Toute la famille se rassemble dans la yourte pour se garder au sec. De la viande est suspendue pour sécher, dans des bols, du beurre de yack et de farine d’orge appelée «tsampa» est servi.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Ça, c'est du beurre. Et ça,
du fromage. En dessous, c'est
de la tsampa. Dans ce bol,
je vais verser du thé
directement sur la tsampa.
La BERGÈRE verse le thé bouillant dans les bols et les sert à sa famille.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
(S’adressant à son enfant)
Kato, après le thé, il faudra
aller voir les bêtes.
KATO
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Oui.
BERGER
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Kato, bois ton thé.
Voilà!
Tu prends du pain?
(Défaisant une miche)
Allez!
Prends ce morceau de pain.
KATO mange en même temps que son père et sa mère.
BERGER
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Allez, Kato, bois!
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Kato, après avoir bu le thé
qu'a fait maman, tu iras voir
les bêtes avec ton père.
KATO
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Oui.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Tu vas aller aider ton père.
Maman va rester à la maison
et baratter le lait.
KATO
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Oui.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Mange bien et va
surveiller les bêtes.
KATO
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Oui.
BERGÈRE
(Propos traduits d’une langue étrangère)
(Brassant le mélange)
Tiens, Kato.
KATO
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Merci.
BERGER
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Moi, je suis un berger.
Je ne suis pas
très doué pour m'exprimer.
Nous, on est des nomades,
des nomades de Kokonor.
Nous gardons les yacks et
les moutons. C'est ce qui fait
de nous des nomades. Nous sommes
descendus au printemps.
C'est notre campement d'été.
À l'automne, on repartira.
Ce lac n'est pas juste un lac.
C'est le Trishok Gyalmo.
Sur la rive se dresse une yourte composée uniquement de banderoles colorées qui flottent au vent.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Selon la légende, le lac
serait né d'une source magique
où la reine Trishok Gyalmo
envoyait sa fille puiser
de l'eau chaque jour.
Cette source était couverte
d'une pierre, mais un jour,
la fille de la reine oublia de
remettre la pierre et la source
jaillit et inonda complètement
la plaine de son eau bleue.
Le lac Kokonor était né.
BERGER
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Quand je vois paître mes yacks
et mes moutons sur les bords
du Kokonor, quand je les vois
brouter et boire l'eau
du lac, je me dis que ce lac
est une bénédiction.
Son eau est merveilleuse.
Le lac Kokonor n'est pas juste
un lac. Quand on boit son eau,
ce n'est pas que de l'eau. Quand
les moutons broutent son herbe,
ce n'est pas que de l'herbe.
Les bêtes abondent dans le pâturage, elles se côtoient en harmonie. Le BERGER selle un cheval et décrit tous ses gestes pour enseigner à son fils.
BERGER
(Propos traduits d’une langue étrangère)
(S’adressant à KATO)
Regarde.
On doit faire comme ça.
Le tapis du dessous
n'est pas bien mis. Il faut
que je tire un peu, là.
La ceinture, on la passe
comme ça. Et on l'attache là.
La longe n'est pas assez longue.
Va me chercher une corde.
Le petit KATO revient avec une corde.
BERGER
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Donne ça, fiston.
Le BERGER et la BERGÈRE chevauchent pour rassembler le troupeau.
BERGER
(Propos traduits d’une langue étrangère)
Les hommes qui viennent ici ne
sont pas juste des hommes, parce
que ce lac est extraordinaire.
Quand on boit cette eau,
lorsque l'on regarde le lac,
on a l'esprit heureux
et on se réjouit.
Des passagers montent à bord d’un avion. L’avion survole le territoire chinois et son parcours apparaît sur la carte. Une ligne pointillée retourne vers Pekin, la capitale. Différentes scènes de la vie quotidienne de la cité chinoise sont présentées en rafale.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Avec ses
21 millions d'habitants,
Pékin est la deuxième plus
grande ville chinoise
après Shanghai.
Capitale depuis le quinzième siècle,
Pékin est le centre
administratif et culturel
de la Chine, mais ces 30
dernières années, la ville a
énormément évolué et n'a plus
rien à voir avec la cité
grise des années Mao.
Désormais, Pékin est colorée.
Les klaxons des quatre millions
de voitures vocifèrent.
La jeunesse est dans les rues,
les bars et les cafés.
Des jeunes prenant un café apparaissent derrière une vitrine. Sur une place des personnages qui ont deux à trois fois la taille d’un humain expriment des émotions très humaines. Ils sont tous masculins et ont le torse nu. Un homme déambule parmi les sculptures.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
De nouveaux quartiers émergent
comme le quartier 798, symbole
d'une communauté artistique
avant-gardiste.
Dans la bouche des géants, des dizaines de dents se déploient comme l'engrenage d'une machine.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Plus de 300 artistes chinois
y résident ou possèdent
des ateliers.
DENG ZHONG, le peintre déambule parmi les sculptures étranges de la place. Il se trouve maintenant devant de nouveaux personnages dont les expressions sont évidentes par leur posture, malgré l’absence de traits dans leur visage.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Deng Zhong est peintre et expose
dans une des 50 galeries
du quartier 798.
DENG ZHONG
(Propos traduits du chinois)
On peut dire
que cet endroit fait partie
des lieux cultes de Pékin.
J'aime ce Pékin.
Ailleurs, des sculptures de membres du parti évoquent la Chine d’un autre temps. Une inscription peinte au pochoir apparaît sur le socle du monument. Elle dit : «Stop making stupid people famous ».
DENG ZHONG
(Propos traduits du chinois)
Ce quartier est unique en Chine.
Pékin s'ouvre culturellement.
Et je trouve ça formidable!
Partout dans le quartier des sculptures sont installées sur les places. DENG ZHONG entre dans la galerie où ses œuvres sont exposées.
DENG ZHONG
(Propos traduits du chinois)
Cette peinture est intitulée
Mer et ciel à l'infini.
Je l'ai peinte en très peu
de temps. Peut-être dix
minutes. Toutefois,
elle est chargée d'émotions.
J'ai appris à dessiner quand
j'étais petit. Je savais
que j'allais devenir peintre.
Je pense que la nature donne
simplement un don à chacun.
Pour moi, la peinture n'est pas
du tout un fardeau parce que
je ne me sens bridé
par aucune convention.
Je suis venu au monde
pour trouver l'inspiration.
Plus loin dans le quartier, des artistes poussent une caisse contenant une œuvre. Dans une cage perchée sur un balcon d'immeuble se trouve un dinosaure rouge. Deux femmes font une séance de photos près des personnages d’aluminium. Une voiture taxi circule dans la ville. Dans l’atelier de DENG ZHONG,l’artiste montre comment il travaille.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Pour ses peintures, l'artiste
utilise la technique de
l'aquarelle à l'encre de Chine.
DENG ZHONG
(Propos traduits du chinois)
Je dilue moi-même la peinture
pour obtenir cette couleur.
J'aime beaucoup cette couleur
bleue. Doucement, l'eau claire
se transforme et prend
la couleur de l'eau de la mer.
En ce qui concerne la couleur
bleue, il ne fait aucun doute
que chacun en a
une conception différente.
C'est mon expérience et
mes émotions que je souhaite
transmettre par ma peinture.
Ce sont elles qui définissent
la nuance du bleu.
Après avoir mélangé l’encre à l’eau, l’artiste trempe sa brosse dans l’eau colorée et commence à l’appliquer sur un support de papier de riz.
DENG ZHONG
(Propos traduits du chinois)
Je fais un tracé ici et là.
Je m'arrête.
Et puis naturellement,
ma composition prend forme.
Quand je peins, je me laisse
porter. Je m'affranchis de la
contrainte de faire une esquisse
ou un brouillon préliminaire.
J'estime que ça rend
le processus artistique
moins efficace.
Parfois, quand vous peignez,
vous êtes subitement inspiré
par quelque chose.
Vous n'avez alors d'autre choix
que de laisser libre cours
à votre spontanéité.
Pendant un moment, l’artiste continue de travailler son œuvre en silence, puis il continue d’expliquer son processus créatif.
DENG ZHONG
(Propos traduits du chinois)
On peut dire qu'il s'agit
d'une représentation plutôt
subjective de la mer.
J'aime la mer. J'ai une relation
particulière avec elle.
La mer qui borne ma ville
natale reste ma préférée,
car je la connais bien.
Pour vous donner un exemple,
quand je peins des choses que je
ne connais pas bien, mon coup de
pinceau n'est pas très naturel.
C'est pareil avec la mer.
Même si la couleur bleue de la
mer de ma ville natale n'est pas
très pure, elle me rassure.
Quand on évoque l'océan,
la couleur bleue ne fait
pas uniquement référence
à l'eau, mais à mon souci
pour l'environnement.
Je l'associe de plus
en plus à cet enjeu.
Les artistes contemporains
se préoccupent de plus
en plus de l'environnement.
Aujourd'hui, les gens sont
à la recherche de ce bleu.
Ils vont le comparer
au brouillard de pollution
et au ciel de Pékin.
La couleur bleue ne se limite
pas seulement à l'océan. Elle
est de plus en plus liée à la
pureté du ciel, à la propreté, à
la quête d'un environnement plus
sain et à la nature en général.
C'est mon interprétation. Elle
ne représente plus uniquement
le bel océan sur une peinture.
Une fois l’oeuvre terminée, DENG ZHONG signe sa toile. La nuit est tombée sur la ville, les édifices semblent vivants avec leurs animations numériques. La vie nocturne est tout aussi animée que la vie diurne.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Face à la modernité de
certains quartiers de Pékin,
il est difficile d'imaginer
aujourd'hui qu'on ait trouvé ici
des traces de civilisation
datant de 300 000 ans.
Des portes s’ouvrent sur un temple de forme circulaire qui semble poser sur un socle tout aussi circulaire.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Le passé est présent partout.
Le Temple du Ciel,
avec ses tuiles bleues,
est une de ses représentations
les plus emblématiques.
Son origine remonte au quatorzième
siècle, à l'époque où l'empereur
était considéré comme le fils
du ciel, chargé de faire
le lien avec l'autorité
céleste pour préserver
le bon ordre sur Terre.
À la base du temple, une terrasse circulaire à trois niveaux offre l’accès au temple par plusieurs escaliers monumentaux. Une allée très large donne sur le temple et les visiteurs doivent d’abord passer sous un portique avant d’y accéder.
Dans une autre partie de la ville se trouve un quartier très calme, des ateliers d’artisans. Des sculptures ornent les balcons, des personnages de terre cuite sont exhibés çà et là. Une cour intérieure donne sur une pièce blanche très éclairée où des porcelaines bleues sont accrochées. Ailleurs dans la pièce, des poteries de porcelaine sont exposées. Plus loin se trouvent un entrepôt où les précieux objets sont rangés et l’atelier où les artisans les fabriquent.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Pékin a su conserver
un artisanat ancestral.
Lorsqu'on s'aventure
dans ses faubourgs, on peut
alors découvrir de petits
ateliers qui entretiennent
des savoir-faire très anciens.
C'est ici, à une heure de
voiture du centre de Pékin, que
l'on trouve un art encore très
prisé chez les Chinois et les
collectionneurs du monde entier.
L'art de la porcelaine bleue.
Une technique inventée en Chine
entre le septième et le dixième siècle.
Dans l’atelier, une femme et un homme rient en regardant un enfant qui tient un pinceau et qui explique son œuvre en peignant sur une grande toile.
ENFANT
(Propos traduits du chinois)
Je vais faire
une fenêtre au plafond du train
pour laisser passer l'air, papa.
MÈRE
(Propos traduits du chinois)
Mais il manque
une roue à ton train.
ENFANT
(Propos traduits du chinois)
Non.
MÈRE
(Propos traduits du chinois)
Tu ne veux pas
lui rajouter une roue?
ENFANT
(Propos traduits du chinois)
Une, deux, trois.
Une, deux, quatre.
MÈRE
(Propos traduits du chinois)
Et ton train n'a pas
de phares? Il risque
de rentrer dans un autre train
qui arriverait en face.
ENFANT
(Propos traduits du chinois)
Le train a éteint ses phares.
MÈRE
(Propos traduits du chinois)
Ah oui!
Dans l’atelier du potier, les tours roulent et la terre est façonnée pour faire les objets tant recherchés.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Guanzhan Liu et sa famille
vivent de l'art de la porcelaine
depuis une quinzaine d'années.
C'est ici dans l'atelier
familial que les pièces
de porcelaine sont tournées.
La porcelaine est une céramique
au même titre que la terre
cuite ou le grès.
GUANZHAN LIU fait visiter l’entrepôt où les pièces sont mises à sécher avant d’être peintes. Elles ont des formes diverses, dont l’une qui comporte une base très ronde avec un cou allongé qui se termine par un bulbe ouvert.
GUANZHAN LIU
(Propos traduits du chinois)
Ces pièces sont
historiquement appelées
les vases en tête d'ail.
Cette partie-là en particulier
ressemble vraiment à une tête
d'ail. Autrefois, on y mettait
des fleurs. C'est une forme
très classique qui date
de l'Antiquité chinoise.
Plus loin, le potier nous montre un autre type de vase qui est plus gros et qui a une forme très ronde avec un cou large et haut.
GUANZHAN LIU
(Propos traduits du chinois)
Voici les vases de la voûte
céleste. On pose ce type de vase
sur une table. C'est un signe
bénéfique. Un symbole de paix.
Le mot «ping» signifie le vase
et «an», la table. Ce qui donne
«Ping An», la paix.
La visite de l’entrepôt de l’atelier se poursuit,les vases sont rangés par forme et grosseur. Dans la partie habitée de l’atelier, la mère nourrit l’enfant avec du riz.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
La production de la porcelaine
bleue qu'on appelle en Chine
la bleue et blanc démarre
véritablement sous la dynastie
des Yuan au treizième siècle,
à l'époque où la Chine
s'ouvre à l'ouest avec
la route de la soie.
Dans l’atelier, GUANZHAN LIU et son épouse préparent la couleur puis l’appliquent sur les précieuses poteries.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
La couleur bleue de la
porcelaine ne se révèle qu'après
un long processus de cuisson.
Toutes les nuances d'intensité
de la couleur et de transparence
sont données par l'artiste
qui doit peindre sans voir
la couleur finale.
Le coup de pinceau initial est
décisif. Il se fait sur
la poterie avant son passage
au four, ce qui ne laisse
aucune place à l'erreur.
GUANZHAN LIU
(Propos traduits du chinois)
Après une cuisson à haute
température, c'est-à-dire
au-dessus de 1300 degrés,
des couleurs extrêmement
vives jaillissent
à la surface du vase.
Ces pigments que nous utilisons
furent importés des pays
musulmans, notamment de l'Empire
perse sous la dynastie Yuan,
entre les treizième et quatorzième siècles.
À l'époque, on l'appelait
le cobalt persan.
Ce matériau est semblable
à l'encre de Chine
dans son application.
La méthode des quatre nuances
s'applique aussi au cobalt.
La couleur peut être dense,
légère, foncée ou claire.
L’artiste continue de peindre et en alternance avec son travail d’application de la couleur, les produits finis sont présentés.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
C'est l'oxyde de cobalt perse
qui va véritablement donner
son identité à cet art de
la porcelaine bleu et blanc.
Un matériau qui, lorsqu'il a
été importé en Chine, était
plus cher que l'or et le thé.
GUANZHAN LIU
(Propos traduits du chinois)
Il y a six ans, j'ai commencé
à apprendre à fabriquer
et à peindre les céramiques
de type bleu et blanc.
L'expérience m'a appris
que la peinture sur céramique
devait s'harmoniser
avec la forme des objets.
Le dessin est en trois
dimensions, comme une sculpture.
Ce n'est pas comme sur du papier
où la surface est plane.
Des motifs anciens sont présentés.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Traditionnellement, les motifs
de la céramique bleu et blanc
étaient un mélange de motifs
floraux hérités des Perses,
incluant des symboles
bouddhiques comme le phénix,
le dragon, le paon
ou le poisson.
Les deux artistes essaient
de renouveler l'art de la
porcelaine en peignant
des motifs plus contemporains.
Les œuvres créées par les deux artistes illustrent des scènes de la vie quotidienne. Une scène de rue, une femme qui se coiffe devant son miroir, une autre qui tient un chat.
GUANZHAN LIU
(Propos traduits du chinois)
En Chine, nous avons un vieux
proverbe qui dit: une pièce
privée de sa céramique est
aussi privée de son élégance.
C'est-à-dire que si dans
cette pièce, il n'y a pas
de céramique, ce n'est pas
une pièce raffinée.
Un vase de céramique bleu et
blanc, ça change l'atmosphère
d'une pièce. Cela indique que
l'on est chez des gens cultivés.
C'est pour cette raison que les
céramiques se vendent très bien
et qu'elles ont une certaine
valeur. Le prix des céramiques
de type bleu et blanc est très
élevé. Les vases de la dynastie
Yuan notamment. Par exemple,
il y a une dizaine d'années,
un célèbre vase de cette
dynastie a été vendu pour plus
de 100 millions de yuans,
13 millions d'euros.
Dans l’atelier les poteries terminées sont exposées. Ensuite, c’est le retour à l’aéroport qui mène le visiteur vers Hong-kong tout au sud de la Chine.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Hong-kong, cette ancienne colonie
britannique est depuis 1997
rattachée à la Chine.
Malgré la rétrocession,
elle continue de cultiver
une identité particulière.
Une voiture sort de la ville et les gratte-ciels s’éloignent lentement.
GUANZHAN LIU
(Propos traduits du chinois)
À une heure de route à l'ouest
de l'île de Hong-kong, dans
les Nouveaux Territoires,
se trouve le village de Tai O
sur l'île de Lantau.
Dans le village de Tai O, les maisons sont construites sur pilotis entre les canaux qui servent de rues, tout autour d’une île, comme une montagne au centre des habitations.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Tai O est le village des Tankas,
une communauté de pêcheurs qui,
depuis des générations,
construisent leurs maisons
sur pilotis au-dessus des
vasières. Toutes les maisons
sont interconnectées, formant
ainsi une communauté très liée.
5000 personnes vivent
à Tai O, mais aujourd'hui,
les pêcheurs se font rares.
Le village vit essentiellement
du tourisme.
EDDY TSETSAI est assis sur une terrasse qui surplombe la vasière.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Eddy Tsetsai est né ici.
Il s'occupe aujourd'hui
d'une ONG qui oeuvre pour le
développement durable de Tai O.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
L'île de Lantau
est une île très importante
pour nous, les Hongkongais,
car elle possédait un grand port
d'échange. À une époque,
beaucoup de navires de pêche
étrangers, comme les Portugais
par exemple, passaient par l'île
de Lantau pour se rendre
dans les mers de Chine.
Jusqu'à la dynastie des Ming,
l'île de Lantau était même
une base navale d'importance.
Progressivement, elle a été
abandonnée et les interdictions
faites aux pêcheurs de naviguer
dans ses eaux ont été levées.
Ainsi, ils ont commencé
à s'installer et à se
regrouper dans ce village
Chaque maison a son bateau, parfois deux.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Géographiquement,
l'île de Lantau se trouve dans
un estuaire où on peut trouver
aussi bien des poissons
d'eau de mer que d'eau douce.
Donc, les pêcheurs n'avaient pas
besoin de naviguer bien loin
pour trouver des bancs
de poissons.
C'est aussi la situation
géographique de l'île
qui a attiré les pêcheurs.
La baie de Lantau est située
dans un endroit abrité du vent.
C'est idéal pour que
les pêcheurs soient en sécurité.
Il y a un autre métier qui
a longtemps existé à Tai O,
c'est celui de saliculteur.
Les habitants appelaient le sel
de Tai O «l'argent blanc».
Grâce à l'estuaire, l'eau de mer
arrivait sur les terres
et créait des marais salants.
Ici, pendant longtemps,
le sel alimentaire a permis
aux habitants de vivre.
Ils l'échangeaient contre
d'autres denrées alimentaires
en Chine intérieure.
EDDY se promène entre les maisons sur des trottoirs suspendus et salue tous les habitants qu’il croise ou qu’il aperçoit sur leur propre terrasse. Une partie du village semble construit sur la terre ferme. Quelques rues abritent les échoppes, il y a même quelques vélos pour y déambuler.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Ici se trouve une école
publique. Par le passé,
elle était bien plus fréquentée.
Selon les anciens, lorsque Tai O
était au maximum de sa
population, il y avait
près de 30 000 habitants.
EDDY se trouve devant le portail de l’école.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Aujourd'hui, il n'en reste
plus que 2000.
À l'époque, quand il y avait
quatre écoles, elles étaient
tellement bondées qu'il y avait
deux sessions d'enseignement,
l'une le matin et l'autre
l'après-midi. Cela vous donne
une petite idée du dynamisme
de la ville. Malheureusement,
aujourd'hui, le nombre de
pêcheurs a diminué et les
conditions de travail ont
changé. Beaucoup de pêcheurs
ont déménagé et aujourd'hui, la
population a tellement diminué
qu'il ne reste plus
qu'une seule école.
Tai O possède trois attraits
principaux: le climat,
l'ambiance et la sécurité.
EDDY se trouve dans une rue près d’une armoire publique dans laquelle se trouve un fauteuil roulant.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Voici une particularité
de Tai O, c'est
le fauteuil de la paix.
Ici, nous sommes les seuls
à en avoir un comme celui-là.
C'est un fauteuil roulant.
Non seulement les habitants
du quartier peuvent l'utiliser,
mais aussi les touristes
qui en auraient besoin
pour aller chez le médecin
ou tout autre déplacement.
Il est donc rangé
dans cette caisse.
En libre-service.
On ne la ferme jamais à clé,
car les habitants doivent
pouvoir en disposer si besoin.
Cette installation unique
démontre l'entraide qui existe
entre les habitants de cette
cité, mais aussi la sécurité
qui règne ici.
La visite se poursuit dans les rues commerciales du village. Puis, EDDY se dirige vers un des quais où un homme s’apprête à monter sur un bateau.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Salut! Comment vas-tu?
Je vous présente Paisuk.
Ça signifie «oncle boiteux»
en chinois.
Tu nous attendais?
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Oui. On peut y aller.
EDDY et PAISUK circulent en bateau entre les maisons puis s’éloignent vers le large.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Paisuk a 65 ans. Il fait
partie des rares habitants
de Tai O qui continuent
à vivre de la pêche.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Depuis combien de temps
habites-tu sur l'île?
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Ça fait
déjà deux générations
que nous vivons sur l'île.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
À quel âge as-tu
commencé à pêcher?
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Depuis tout petit.
J'accompagnais mon père
à la pêche.
J'ai toujours été pêcheur.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Et tu t'es marié ici?
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Non. Je me suis marié
en Chine. J'avais 48 ans.
Plus jeune, personne ne voulait
de moi, car je boite.
Il y a beaucoup de houle.
PAISUK tire son filet.
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Je vous avais prévenus.
Ici, on pêche des poissons d'eau
douce, mais aussi d'eau de mer.
Ça dépend de ce qui vient
dans notre filet.
Et avec de petits filets,
on peut attraper des crevettes.
Parfois, on en pêche un kilo,
parfois deux.
Oh, il y a plein
de petits poissons.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Ah oui! Je vois.
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Ils sont petits et mignons.
Ce sont des poissons-tambours
à gros yeux.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Ah oui!
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Attention. Leurs nageoires
sont pointues.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Je vois.
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Si tu n'es pas habitué,
tu peux te blesser.
Même moi, ça m'arrive parfois.
Tu vois, c'est simple d'être
pêcheur. Il suffit d'arrêter
son bateau pour attraper
des poissons. En général,
je n'utilise pas de filet
pour pêcher ce type de poissons,
car ils sont trop petits
pour qu'on les vende.
Ils ne valent pas grand-chose.
PAISUK dépose les poissons au fond du bateau.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Pour moi, la mer de Tai O
représente la paix.
C'est un lieu de satisfaction
et de plénitude.
Selon les habitants de Tai O,
l'eau est la racine
des pêcheurs.
C'est-à-dire que les pêcheurs
vivent grâce à la mer.
Hong-kong, c'est le mélange
des îles et de la mer.
Nous devons toujours montrer
du respect envers la mer.
PAISUK
(Propos traduits du chinois)
Nous dépendons de la mer.
C'est elle qui nous nourrit.
Moi, j'ai passé ma vie en mer
et, forcément, il y a
des sentiments qui naissent.
EDDY TSETSAI
(Propos traduits du chinois)
Tai O est unique.
C'est la seule ville authentique
de pêcheurs qui subsiste
à Hong-kong aujourd'hui.
Elle rappelle aux citadins
que la vie peut être
plus simple et sereine.
Elle nous fait réfléchir
sur notre vie. Qu'est-ce
que la vie? A-t-on besoin
d'une vie citadine trépidante
ou plutôt d'une vie sereine?
Dans l’aéroport des appels annoncent les prochains vols. Sur la carte de la Chine, une ligne trace le trajet entre Hong-kong et NanTong. Nantong se situe au nord tout près de la côte et l’eau y est très présente.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
La ville de Nantong s'est bâtie
sur le Yangtze, le fleuve bleu,
dans une région où le climat
est particulièrement propice
à la culture du coton.
C'est ici qu'on trouve un des
plus anciens et populaires arts
textiles, le calicot bleu.
Un musée lui a été consacré.
Il présente toute la mémoire
de cet art né en Chine
au quatorzième siècle.
Une visite du musée du calicot bleu commence.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Le musée a été fondé par une
famille de fabricants dont
Ling Shu Wu est la fille aînée.
LING SHU WU examine des pochoirs servant à l’impression des tissus.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Après des études d'art appliqué,
elle se consacre au musée et à
la transmission de la technique
de fabrication du calicot bleu.
LING SHU WU travaille à l’aide d’un métier à tisser artisanal. Le calicot est une toile tissée qui porte des motifs.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
La technique de calicot et très
ancienne et prend son essor
en Chine, à l'époque de la
dynastie des Han de l'ouest,
200 ans avant Jésus-Christ.
À l'origine, c'était
un savoir-faire qui se
transmettait de mère en fille.
Les motifs passent des plus simples aux plus élaborés et la finesse du tissage varie. LING SHU WU fait une démonstration de son art.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
Voici comment
on crée les motifs. Alors,
toutes les formes doivent
être tracées sur du papier
puis découpées.
Ceci est un motif ancien
que nous avons recopié.
Un phénix avec des boutons
de fleur. Maintenant,
je peux commencer à le découper.
Ce découpage se fait à la main
à l'aide de ce
(langue_etrangere=EN]cutter[/langue_etrangere)
.On peut dire que le calicot,
c'est l'art de manipuler un
(langue_etrangere=EN]cutter[/langue_etrangere)
.On peut commencer par ici.
Lorsque l'on découpe le pochoir,
il faut tenir le
(langue_etrangere=EN]cutter[/langue_etrangere)
bien droit.
Tout en découpant délicatement la feuille, LING SHU MU explique sa technique.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
Et contrairement à ce que l'on
fait avec une machine, on peut y
ajouter nos propres sentiments
et modifier certaines formes.
Une fois le pochoir prêt, LING SHU WU le dépose sur le tissu et s’apprête à imprimer le motif.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
On va mettre ça sur le tissu
blanc. J'ai déjà préparé
l'enduit. Tout est bien mélangé.
La pâte est composée de haricots
jaunes et de chaux. Si la pâte
contient les bonnes proportions
entre les ingrédients,
elle va bien adhérer au tissu.
La pâte à base de haricots
jaunes est collante
et la chaux se solidifie vite.
C'est pour ça que l'on a choisi
ces ingrédients. Le peuple
nous a transmis ce savoir-faire
depuis des centaines d'années.
LING SHU WU applique la pâte avec un spatule, comme si elle enduisait le tissu de plâtre.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Cette technique d'obtention
des motifs par soustraction
de matière, ici un mélange de
chaux et de pâte de haricots, se
nomme la teinture par réserve.
En retirant le pochoir, LING SHU WU découvre le motif en relief qui adhère au tissu. Ensuite, elle se dirige à l’extérieur pour teindre le tissu.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
J'ai toujours été entourée
de ces tissus. Enfant, je voyais
mes parents les fabriquer et
je me sentais inférieure
aux autres, car pour moi,
les calicots appartenaient
à la génération de mes parents
ou même celle d'avant.
En les regardant faire,
ma curiosité a été attisée.
De plus, quand j'étais en
vacances, je faisais le guide
pour les groupes d'enfants qui
venaient visiter cet endroit.
Et même si je finissais
couverte de teinture bleue,
ça m'amusait vraiment.
Plus tard, après bien
des années, je suis entrée
à l'université où
j'ai étudié les arts appliqués.
Mon père m'a aussi présentée
à de nombreux artistes
de sa génération.
Alors, j'ai peu à peu
approfondi ma connaissance
de l'art du calicot et
j'ai pu en saisir l'essence.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Pour préparer le pigment
qui donnera sa couleur bleue
à l'étoffe, il faut mettre
les feuilles de l'indigotier,
un arbre poussant
majoritairement en Afrique, à
fermenter à froid dans une jarre
pendant une dizaine de jours.
Dans un bassin rempli d’eau bleue, LING SHU WU trempe et retrempe son morceau de tissu pour le teindre.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
On le plonge dedans et le
ressort, plusieurs fois. Et puis
on le fait sécher à l'air libre
plusieurs fois aussi.
Là, on peut dire que la couleur
est suffisamment foncée.
C'est fini.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Pour obtenir ce ton de bleu
intense qui tire jusqu'au noir,
il faut répéter l'opération
de trempage et de teinture
à l'indigo trois à quatre fois
par jour. Et dans l'idéal,
pendant plusieurs semaines.
LIN SHU WU met le tissu à sécher sans l’essorer, juste en le laissant s’égoutter suspendu à une rampe de galerie.
Le calicot est certes
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
un assemblage de motifs
et de couleurs très simples,
mais les choses les plus simples
recèlent souvent une profondeur
insoupçonnée et ceci s'applique
aussi bien à l'art lui-même
qu'à son procédé de fabrication.
Après que la teinture soit terminée, LING SHU WU gratte les restes de l’enduit appliqué au pochoir et le motif apparaît d’un blanc immaculé.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Ces tissus servaient à
la confection de vestes,
de grands jupons plissés
ou encore de parures de lit
qui étaient offerts lors de
cérémonies traditionnelles comme
les mariages, les enterrements
ou certaines fêtes de village.
Ils étaient symbole de
fertilité, de chance et de
prospérité dans la culture Miao.
LING SHU WU repasse en revue ses dernières œuvres tissées et teintes.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
Dans le temps, les calicots
faisaient partie de la dote.
Lorsqu'une jeune épouse
allait rejoindre la famille
de son mari, les familles
un peu plus aisées offraient
une vingtaine de pièces.
Si les gens souhaitaient
posséder de tels tissus
regorgeant d'images, c'est
qu'ils exprimaient leurs envies.
Aujourd'hui, nous en savons
plus sur leurs aspirations
en regardant ces tissus
qui faisaient partie
de leur quotidien.
Les détails des différents motifs sont présentés.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
Ces motifs sont d'une grande
valeur culturelle. Prenez
celui-ci avec cette grue
immortelle. Ce phénix volant
au-dessus des pivoines et
ces pêches de la longévité.
Ce sont des motifs qui
reviennent tout le temps.
Et vous voyez ici,
c'est Liu Hai,
le crapaud marin. Il joue
avec un autre crapaud.
Et ça, c'est aussi un symbole
de prospérité et de richesse.
Ce motif contient une pêche
qui représente la longévité.
Même chose pour
les chauves-souris.
Ici, ce sont deux lions
qui s'amusent à faire rouler
des balles en tissu brodées.
Ici, on voit parfaitement
le lion. Sa tête est de face
avec ses deux yeux, mais
son corps est de profil.
L'impression qui se dégage
de ces calicots est très
positive et très motivante.
Cette beauté nous indique
la vie vers laquelle
nous devrions tendre.
LING SHU WU donne un atelier à des enfants.
LING SHU WU
(Propos traduits du chinois)
Regardez-moi bien. Je vous
montre. On peut plier le tissu
en triangle. Plus il est petit
et plus c'est facile à attacher.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Les Chinois ont aujourd'hui
pris conscience de la valeur
de leur patrimoine culturel.
Le calicot bleu en fait partie.
C'est à l'école que commence
cette prise de conscience.
Et peut-être qu'un jour,
un de ces enfants
reprendra le flambeau
de cette technique ancestrale.
Un récapitulatif des lieux visités défile.
JULIETTE BINOCHE (Narratrice)
Bleu d'hier et d'aujourd'hui,
paysages ou oeuvres d'art,
la couleur de la pureté
s'impose toujours.
Elle élève l'âme de la Chine
à travers les siècles vers
un ciel immuable qui n'a pas
fini de nous émerveiller.
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